
À Versailles, il est désormais possible de découvrir, au cours de visites guidées du théâtre de la Reine, situé dans les jardins du Petit Trianon, un décor de scène du XIXe siècle entièrement restauré et complété.
Cette Place publique fait partie d’un ensemble de décors de répertoire commandé en 1836 par le roi Louis-Philippe à Pierre Ciceri (1782-1868), l’un des plus illustres décorateurs de sa génération. Il était initialement composé de cinq paires de châssis de coulisse, cinq frises de ciel et d’une toile de fond. Pour des raisons qui demeurent inconnues, certaines parties furent vendues en 1880, laissant un décor morcelé.
Une restauration selon les techniques du XIXe siècle
Complet à près de 70 %, cet ensemble vient donc de passer entre les mains expertes des restaurateurs qui ont notamment eu pour tâche de restituer les parties manquantes. Ils ont pour cela pu s’appuyer sur l’expérience acquise au cours de deux opérations similaires réalisées durant les dernières années : la restitution d’une toile de fond pour l’Intérieur rustique et une intervention sur le Palais de marbre rehaussé d’or, réalisé par Ciceri pour l’Opéra royal en 1837. Plus d’une année d’études a été nécessaire avant que cette restitution ne soit menée à bien, dans le respect des techniques du XIXe siècle, grâce notamment à une utilisation ingénieuse du brou de noix. Pour la toile de fond disparue, aucune information ni description n’existait. Les restaurateurs ont donc décidé d’y réunir, à la manière d’un caprice architectural, différents monuments versaillais : on reconnait ainsi la cathédrale Saint-Louis, la façade du théâtre Montansier, ou encore le clocher de l’ancienne église Saint-Julien, visible sur le fameux tableau de Pierre Patel immortalisant le château en 1668.

Pierre Ciceri, figure d’une génération
Spécialiste des peintures de paysages, et notamment des grandes toiles panoramiques de fond de scène, Pierre Ciceri a œuvré sur de nombreux opéras célèbres, comme Guillaume Tell de Rossini (1829) ou Robert le Diable de Meyerbeer (1831). Proche de Louis Daguerre, il exploite certaines de ses innovations dans ses créations, comme en 1825 lors de la représentation de La Belle au bois dormant de Carafa, où un cyclorama mobile vient créer une illusion de mouvement dans le décor. Ses collaborations prestigieuses et ses nombreuses avancées techniques font de Pierre Ciceri l’un des chefs de file de la scénographie romantique au XIXe siècle.

Simon Poirier
Visite guidée « Les effets scéniques au théâtre de la Reine »
À réserver sur : www.chateauversailles.fr