Vêtements bavards

Mahjoub Ben Bella (1946-2020), artiste aux multiples terrains de jeux, jeta l’ancre à Tourcoing, ville qu’il appréciait tant et dont il fréquenta, tout jeune étudiant, les salles de l’école des Beaux-Arts. Ses œuvres résultent de la fusion entre deux cultures : celle du Nord de la France, dont le terroir constitue un point de départ à ses créations, et celle de son Algérie natale, incarnée par la calligraphie arabe. Ce motif-signature se déploie avec élégance sur ses tableaux jusqu’à en recouvrir totalement la surface. La polyvalence et la curiosité de cet artiste le mène à explorer d’autres supports, offrant à ses mots des mondes et volumes nouveaux. Sa collaboration avec la célèbre entreprise de vente par correspondance roubaisienne La Redoute libère son écriture, la faisant voyager de la toile de ses peintures à celle de robes et chemises dessinées par la créatrice belge Souad Feriani. Cette démarche n’est en rien anecdotique dans l’histoire de la mode et du costume. Le vêtement constitue une surface de choix sur laquelle le mot peut être brodé, thermocollé, imprimé ou encore peint au fil des siècles et du développement des techniques textiles. Porteur de sens à l’image d’une page blanche prête à accueillir les lettres du poète et du publiciste, le vêtement se pare de mots qui décorent, définissent, suggèrent et clament. Les cabines du musée jouent le rôle d’auditorium le temps d’un été en exposant ces objets muets mais néanmoins dotés de parole.