La Librairie Blaizot présente une cinquantaine de reliures d’Alain Koren réalisées entre 2007 et 2022. Ses créations se distinguent par différentes caractéristiques, dont le travail d’incision de la peau, la recherche de l’équilibre et l’affirmation d’un style.
« Parce que la forme est contraignante, l’idée jaillit plus intense », écrit Charles Baudelaire en 1860. Si l’homme de lettres évoque les contraintes de l’écriture poétique, en particulier du sonnet, celles que s’est imposées Alain Koren dès ses débuts dans le métier de relieur aboutissent à une esthétique fondée sur l’équilibre des compositions, leur profondeur et leur légèreté obtenues par la richesse des motifs et un goût sûr dans le choix et l’agencement des teintes. L’ensemble étant contraint par la forme du livre et les spécificités techniques de la reliure. Le spectateur reste intrigué et ébloui par ce que le relieur appelle la mosaïque déstructurée : « J’ai commencé le décor avec un vrai souci de réaliser des mosaïques de belle facture. Par contre j’avais aussi à cœur d’en modifier les codes graphiques qui me paraissaient très contraignants, très géométriques et convenus, si bien que, sans trop l’avoir programmé, je me suis rapidement éloigné du travail de maquette et, par dérivation, d’un projet visuel préalablement établi. Mon intérêt allait vraiment vers une pratique plus souple, plus créative, plus incertaine aussi, dans l’idée d’un graveur qui élabore sa plaque au fil du travail au burin et des épreuves successives qu’il modifie au fur et à mesure de l’avancée du travail. »
Des plats comme la toile d’un plasticien
Les recherches d’Alain Koren s’inscrivent davantage dans le domaine des beaux-arts (formation suivie à Aix-en-Provence) que dans celui des arts décoratifs. Une position défendue par le relieur pour qui les plats sont, comme la toile du plasticien, un lieu d’expression libre et dynamique, comme l’est la peinture gestuelle, tempéré par une maîtrise singulière des techniques de couvrure et de décor par incision. « J’en suis venu assez vite à modifier complètement le process habituel de la couvrure, en découpant ma peau et mon décor à plat sur la table – une hérésie peut-être, mais qui ouvrait pour moi un champ pictural immense et une pratique créative jusqu’au bout du travail. » Au fil de l’exposition, le visiteur prend la mesure de l’évolution d’un style : les incisions et leur extraordinaire finesse, tout comme l’apparition des couleurs sur les peaux claires créent des espaces inattendus dévoilant, entre rêve et émotion, ce qui est derrière les apparences.
Marie Akar
« Alain Koren, Couvrure ouvrures, mosaïques destructurées »
Du 5 au 22 octobre 2022 à la Librairie Blaizot
164 rue du Faubourg Saint-Honoré, 75008 Paris.
Tél. 01 43 59 36 58
www.blaizot.com
Vernissage le 5 octobre à partir de 15h30.
Catalogue, 80 p.
Invité à l’exposition Éphémère, le 6 octobre, mairie du VIe arrondissement de Paris, de 16h à 20h45.