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Avril 2025 : les livres à ne pas manquer pour les amateurs d’archéologie

Des mystères de l’Égypte antique à la complexité de la culture gauloise en passant par la figuration humaine dans l’art paléolithique, découvrez notre sélection de livres du mois.

Sapiens l’Aurignacien

Connaissez-vous Homo sapiens ? Cet humain, « comme vous et moi », qui plonge notamment ses racines dans un des temps lointains de la Préhistoire : l’Aurignacien. Au fil des pages de cet ouvrage, nous sommes conviés à découvrir son quotidien au plus près des apports de la recherche actuelle sur cette époque datée des alentours de 40 000 ans. Porté par son enthousiasme et sa volonté de faire connaître l’état de ces connaissances, l’auteur interpelle directement le lecteur, lui exposant son sujet avec familiarité. S’imaginant caméra au poing, il reconstitue des scènes de vie, nous faisant ainsi accéder à l’intimité des populations d’alors, dont les vestiges retrouvés demeurent très partiels. Nous suivrons leurs pas dans le Sud-Ouest de la France, en Dordogne, mais nous voyagerons aussi bien au-delà, en Europe et jusqu’en Asie et en Afrique. Révisant l’histoire de l’humanité depuis ses origines africaines, l’évolution des techniques utilisées (la pierre taillée, le travail de l’os), la diversité des matières travaillées, les méthodes de chasse, ce portrait n’élude en rien le monde de l’art et de la spiritualité. P. B.

Dans l’intimité de Sapiens. Vivre il y a 40 000 ans, 2025, Nicolas Teyssandier, Paris, Alisio, 280 p., 20,90 €

Études léonines

Actes de journées d’étude ayant eu lieu en mai 2023 à l’Institut catholique de Paris, cet ouvrage croise les regards d’archéologues, d’historiens, d’historiens de l’art et de philologues, offrant un dialogue fécond entre les disciplines et les méthodologies. Consacré à la figure du lion, il entraîne le lecteur au fil d’approches variées : aux considérations éthologiques et zoologiques succèdent des réflexions plus symboliques et historiques sur la place de cet animal dans l’iconographie et les pratiques royales et oraculaires d’Assyrie, d’Égypte, mais aussi dans la numismatique hellénistique – où il figure en bonne place. En forme d’hommage posthume au professeur Laurent Nagle, ce livre est enrichi de photographies de l’animal dans son milieu naturel, mais aussi de vues anatomiques, de monnaies anciennes ou encore d’œnochoés étrusques et autres vestiges antiques. R. B.-R.

Le lion dans le pourtour méditerranéen. Portrait iconographique, historique et biogéographique d’un grand félin, 2024, Margaux Spruyt, Véronique Vassal (dir.), Paris, éditions du Cerf, 328 p., 39 €

Mystérieuse Égypte

Comment les Égyptiens de l’Antiquité sont-ils parvenus à ériger leurs splendides monuments ? Avec quelles formidables connaissances technologiques ont-ils édifié il y a plusieurs millénaires des merveilles pharaoniques qui provoquent aujourd’hui la même admiration qu’hier ? Ce sont les épineuses questions auxquelles Franck Monnier, célèbre spécialiste du bâti égyptien antique, se confronte dans cet ouvrage très richement documenté : relevés, schémas, dessins, photographies et cartes nous plongent dans la réalité concrète de ces vestiges et des énigmes qui les entourent. Sans craindre de se pencher sur les théories les plus farfelues concernant le Sphinx et les pyramides de Gizeh, notamment leur origine prétendument extraterrestre, leur hypothétique lien avec le continent perdu de l’Atlantide ou encore leur supposée dimension occulte, l’auteur y oppose une mise au point savante et détaillée des nombreuses techniques de maçonnerie, d’ingénierie et de métallurgie qui étaient réellement maîtrisées par ces grands bâtisseurs. R. B.-R.

La science face aux dossiers mystérieux de l’Égypte ancienne, 2025, Franck Monnier, Arles, éditions Actes Sud, 272 p., 32 €

À la recherche des dinosaures perdus

En 2010, des carriers tombent sur un drôle de caillou, plus gros que les autres. Les spécialistes du muséum d’Angoulême sont formels : c’est un os de dinosaure. Le site d’Angeac se révèle alors être un des gisements les plus fascinants livrant des dizaines d’espèces répertoriées et plusieurs nouveaux spécimens : un os de 2 m fait ainsi ressurgir du passé un sauropode géant inconnu. Mazan, dessinateur de bande dessinée, fondu de paléontologie, n’en revient pas : à 10 km de chez lui, au cœur des Charentes, il peut rencontrer des scientifiques qui déterrent des fossiles. Les échanges avec les chercheurs se révèlent fructueux et humainement riches. La passion du dessinateur et la curiosité des paléontologues les conduisent vers une aventure inattendue, notamment quand Ronan Allain, paléontologue au Muséum national d’Histoire naturelle, lui propose d’accompagner son équipe au Laos. En mélangeant dessins, photos, graphiques et infographies, l’auteur nous immerge dans un quotidien inédit. Au-delà des remarques attendues sur la nourriture et les différences de vie, le récit s’attache surtout à décrire les difficultés scientifiques tant les contraintes sont grandes. Distance, chaleur, eau, rareté des engins de terrassement, croyances religieuses, tout peut devenir obstacle. Cet album est une passionnante initiation au métier de paléontologue et la preuve que certains rêves d’enfant peuvent se réaliser… S. D.

Les dinosaures du paradis. Naissance d’une aventure paléontologique, 2024, scénario et dessin Mazan, Paris, éditions Futuropolis, 220 p., 26 €

Au charbon ! 

Très complet, cet ouvrage s’intéresse au charbon de terre, matériau si présent et si singulier, qui caractérise une région entière depuis, et c’est méconnu, près de 2 000 ans. Définissant d’abord le sujet, retraçant l’historiographie de ces recherches, posant les problématiques et méthodologies, fouillant dans les données fournies par les sources archéologiques, il essaye ensuite de comprendre son utilisation dans le Nord de la France (Flandre et Hainaut ), sa provenance (et son mode d’extraction), son transport et son commerce, son implication dans la métallurgie du fer avant de largement conclure sur les causes et les conséquences de ce phénomène – mis en lumière par les intenses campagnes d’archéologie préventive de ces dernières années – et les perspectives de recherche, comme autant de pistes à explorer. É. F.

Le charbon de terre dans la France du Nord. Son usage jusqu’à l’époque moderne, 2025, Benjamin Jagou, Villeneuve d’Ascq, Les Presses universitaires du Septentrion, 366 p., 25 €

Les 80 ans de la commission des fouilles

À l’occasion des 80 ans de la commission consultative des fouilles (anniversaire sur lequel nous reviendrons dans un numéro d’automne), Nicolas Grimal, secrétaire perpétuel de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, retrace, le temps de ce brillant essai, les circonstances de la création de cet organisme aussi original que puissant. Fruit de la ténacité de deux hommes hors du commun, le général de Gaulle et l’archéologue Henri Seyrig, elle devait permettre de faire rayonner la France dans le monde – dans ce qu’elle a de meilleur à savoir son réseau diplomatique et son archéologie. Aujourd’hui la « commission des fouilles », qui dépend du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, finance ou co-finance environ 160 missions pour un budget total qui avoisine les 2 millions d’euros. Au fil d’une plume alerte et élégante se déploie une histoire (qui commence dès le XIXe siècle) de guerres et de coopérations, d’hommes et de femmes aussi brillants qu’épouvantables (pour certains), de réussites inouïes et d’échecs dantesques – en bref une passionnante épopée… française ! É. F.

L’archéologue et le diplomate, 2025, Nicolas Grimal, Paris, Les Belles Lettres, 200 p., 23 €

Un siècle à soi

Si tout le monde connaît le « siècle (sous-entendu d’or) de Périclès » (soit le Ve siècle avant notre ère), bien moins nombreux sont ceux qui se souviennent de son aïeul, le VIe siècle avant notre ère. Mal aimé, ombreux, venant péniblement clôturer des époques longtemps dites archaïques, ce siècle semblait n’intéresser personne jusqu’à peu… et la publication de cette imposante monographie, qui vient (enfin) rétablir un juste équilibre. Et à la lecture de ces 27 chapitres (répartis en trois grandes parties thématiques), on découvre une époque qui n’est ni un prolongement décadent de la précédente, ni la timide genèse du brillant siècle à venir, mais celle du développement d’une société (qui vit, excusez du peu, la naissance de Solon, Thalès, Pythagore et Clisthène…) dans sa singularité. Un ouvrage appelé à devenir de référence, émaillé de très belles illustrations, qui donne vie, corps et âme à cette formidable et dense période. É. F.

Le monde des Grecs au VIe siècle avant notre ère, 2024, Francis Prost, Jean-Manuel Roubineau et Didier Viviers (dir.), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 749 p., 34 €

Gauloiseries

Gaulois ! Il suffit de prononcer ce nom pour que surgisse une kyrielle de représentations dominée par l’imposant guerrier, plutôt blond, aux cheveux longs et la spectaculaire moustache, coiffé d’un casque ailé, à l’origine de célèbres personnages de bande dessinée, mais aussi des valeureux résistants face à l’envahisseur romain, bâtisseurs de la nation et de l’identité française, exportés jusque dans nos colonies : « Nos ancêtres les Gaulois » ! Comme souvent pour les périodes anciennes principalement renseignées par l’archéologie, données scientifiques et imaginaire sont à l’œuvre dans l’élaboration de ces figures emblématiques fortes d’une symbolique non dénuée d’idéologie. Aussi est-il régulièrement nécessaire de dépoussiérer ces stéréotypes schématiques à la lumière des plus récentes découvertes. Retraçant l’invention de la Gaule, place est faite aux Celtes, pour une ouverture sur un monde au-delà de nos frontières nationales, nous donnant à saisir la complexité d’une culture façonnée par les aléas de son temps et nos capacités à la reconstituer. Cette réédition en poche enrichie nous invite dès lors à « relire l’histoire de ce peuple sans écriture », dans une mise en page colorée, ponctuée d’élégantes illustrations, loin de toute idée reçue dans le fond comme dans la forme. P. B.

Les Gaulois, 2025, Dominique Garcia, Paris, CNRS Éditions, 160 p., 22 €

Accords perdus

Les représentations humaines sont les moins fréquentes dans l’art de la préhistoire – pourtant abondant. À bien compter cependant, elles totalisent 13 % de l’ensemble des figures recensées, se plaçant en quatrième position derrière le cheval, le bison et le bouquetin. La figure humaine est-elle donc vraiment si marginale ? Telle est la question posée par cet ouvrage qui y répond en explorant les différentes expressions du corps humain, peint, gravé ou sculpté : figures féminines dites « Vénus », vulves et phallus, visages et corps, mains négatives ou positives, êtres hybrides, corps animalisés, métamorphosés, schématisés ou réalistes… La diversité des rendus, richement illustrée par des photos de qualité parfois difficiles à interpréter, conduit à une analyse de chaque catégorie visant à en saisir sa spécificité au sein de cet ensemble mal connu. Le corps humain, défini selon des critères anatomiques, se donne ici à lire comme l’expression plastique d’une socialisation, notamment indiquée par le port de vêtements ou de parures, mais aussi par des mises en scène dont l’histoire reste une énigme. P. B.

La figuration humaine dans l’art paléolithique, 2025, Oscar Fuentes et Nathalie Cahoreau, Centre national de Préhistoire, ministère de la Culture, La Crèche, Éditions La Geste, 88 p., 20 €

Hommage à Dominique Henry-Gambier

Ancrée dans la tradition des ouvrages « hommages » (expliquant pourquoi les travaux de tel ou tel scientifique sont importants), cette publication, hélas, posthume est dédiée à Dominique Henry-Gambier (1950-2022). Cette paléoanthropologue a en effet renouvelé nos connaissances sur les hommes préhistoriques et leurs pratiques funéraires, par sa grande exigence méthodologique et la rigueur de ses analyses, mais aussi son entregent et un dynamisme moteur dans les équipes qu’elle a dirigées ou intégrées. Réétudiant l’ensemble des restes osseux du Paléolithique récent européen, elle a tordu le cou à des interprétations trop rapides, notamment dans l’estimation du sexe ou des datations. Elle a également eu le grand bonheur d’être la première à étudier des restes humains de la grotte de Cussac. Magnifié par les poétiques photographies d’Émilie Lesvignes, ce volume présente plusieurs synthèses ainsi que des points de méthode essentiels. Un hommage qui fera date par la nouveauté et la richesse de son contenu, et honneur à la mémoire de Dominique Henry-Gambier, chercheuse engagée et inspiratrice des futures générations de préhistoriens. R. P.

Dominique Henry-Gambier. Itinéraires d’une paléoanthropologue, du terrain aux interprétations sociales, 2025, Bruno Boulestin (dir.), Bordeaux, Ausonius éditions, collection Thanat’Os, 6, 320 p., 35 €

20 ans d’archéologie chartraine

C’est assez rare pour être noté : ce livre, offrant la synthèse de deux décennies de recherches archéologiques à Chartres, propose une maquette particulièrement séduisante, mettant en valeur aussi bien les textes des auteurs que les riches illustrations choisies. Reflet du travail des agents de la Direction de l’archéologie sur le terrain (depuis la création de cette direction en 2003, même si l’archéologie est pratiquée dans la ville depuis les années 1970), il aborde « la ville avant la cité romaine », le moment « Autricum », quand elle fut l’une des plus grandes capitales du Nord de la Gaule, le haut Moyen Âge puis la ville médiévale et moderne. Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’au cours de ces dernières années, les découvertes se sont succédé sans se ressembler à l’image, entre autres, des inattendus objets magiques, de l’exceptionnel plafond à caissons peints et sculptés en bois ou des peintures murales à fresque antiques… ​​​​​​​É. F.

Chartres à la lumière de l’archéologie. 20 ans de recherches et de découvertes, 2024, Mathias Dupuis, Juliette Astruc, Pierre‑Antoine Lamy (dir.), Paris, MkF éditions, 259 p., 38 €