Du nouveau sur des objets en bronze de la fin de l’Âge du fer à Mandeure

Fragment gauche d’un masque représentant un visage humain et restitution du côté droit. Musée de Montbéliard, numéro inventaire 1882-1-4. © J. Gracio
Lancé en 2002, le projet collectif de recherche « Approche pluridisciplinaire d’une agglomération antique : Epomanduodurum » sous la direction de Philippe Barral (université de Franche-Comté) aide à mieux comprendre les différentes occupations de la seconde agglomération de la tribu des Séquanes, aujourd’hui implantée sur les localités de Mandeure et de Matay dans le Doubs. Le réexamen de plusieurs éléments d’un dépôt d’objets en bronze, découvert au début des années 1880, offre des détails inédits sur la métallurgie de cette époque.
L’élan initié en 2002 s’est poursuivi entre 2005 et 2011 en s’attachant au développement de l’agglomération antique, de son émergence à la fin de l’Âge du fer à son déclin au début du Moyen Âge. En 2010, c’est une équipe de l’Inrap qui est intervenue avant un projet d’aménagement d’un espace muséographique, à moins de 50 m au nord-ouest du théâtre antique (classé au titre des Monuments historiques depuis 1964). En 2023, une autre intervention a été pratiquée par une équipe de la MSHE Claude-Nicolas Ledoux (Besançon), dans la partie sud-est du théâtre.
Le pavillon gauche d’un carnyx
Par ailleurs, depuis 2016, une étude est menée sur 24 éléments en bronze, attribués à la fin du second Âge du fer et conservés au musée du château des Ducs de Wurtemberg à Montbéliard et au musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de Besançon. L’ensemble représente 1 kg d’alliage cuivreux. Or, d’après les archives, près d’une tonne de bronze avait été vendue par l’inventeur de ce dépôt à la fin du XIXe siècle ! Le reliquat des objets conservés aujourd’hui ne représenterait donc que 0,1 % de la découverte initiale… Parmi eux, on distingue le pavillon gauche d’un carnyx (instrument à vent gaulois) à tête de sanglier constituée ici d’au moins deux parties. Cette pièce réalisée dans une tôle de bronze d’1 mm d’épaisseur est remarquablement bien conservée malgré de nombreuses mutilations (passage au feu, écrasement, démontage, etc.) mais ne possède plus ni sa forme initiale ni ses volumes. Le boutoir, ou groin de l’animal, correspond à une pièce rapportée, soudée à l’étain puis rivetée : s’agit-il d’une réparation ultérieure ?
Pavillon gauche d’un carnyx à tête de sanglier réalisé dans une tôle de bronze. Musée de Montbéliard, inv. 1882-1-5. © J. Gracio
Un masque votif ?
Parmi les autres vestiges en bronze, on reconnaît par ailleurs deux autres boutoirs (un groin aux bords découpés et un second soudé à d’autres éléments en bronze), quatre oreilles droites de carnices (pluriel de carnyx) dont deux quasiment intactes (avec la tige permettant de les fixer à un pavillon via une soudure à l’étain et portant la trace d’une pièce rapportée, de type applique décorative, malheureusement aujourd’hui disparue) ou encore un fragment, jusqu’à présent attribué à un pavillon gauche de carnyx mais qui appartiendrait à un visage humain (masque) à l’échelle 1. Cette pièce offre une rangée de cils représentés sur le bord libre de la paupière supérieure et trois plis palpébraux supérieurs : s’agit-il d’un masque votif ou bien du visage d’une divinité ? Le mystère reste entier et une étude plus approfondie mérite d’être menée. D’autres fragments sont attribués à des enseignes militaires, en forme de sanglier, de laie ou de taureau. La reconstitution d’un carnyx, dans le cadre d’un projet d’archéologie expérimentale, aide à se faire une idée de l’instrument à taille réelle, utilisé aussi bien en contexte guerrier, lors de temps troublés, qu’en contexte cultuel, en temps de paix.