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La vie de château à Talmont-Saint-Hilaire en Vendée 

Vue du complexe de la tour-maîtresse du château de Talmont-Saint-Hilaire : à gauche la tour d’escalier ; au centre la tour-maîtresse sur le clocher-porche à arcades ; à droite la porte à plan coudé.

Vue du complexe de la tour-maîtresse du château de Talmont-Saint-Hilaire : à gauche la tour d’escalier ; au centre la tour-maîtresse sur le clocher-porche à arcades ; à droite la porte à plan coudé. © C. Chauveau, Hadès, 2019

Situé dans le sud-ouest de la Vendée, le château de Talmont-Saint-Hilaire domine le paysage depuis le XIe siècle. Portés par la commune, les travaux de restauration récents ont été accompagnés d’une étude archéologique des élévations et par la fouille d’un couloir de la tour-maîtresse menées par la société Hadès entre 2018 et 2023. Des découvertes inédites ont été réalisées, permettant d’affiner les connaissances sur le château.

À l’origine du site, un vaste castrum est installé sur un promontoire rocheux au XIe siècle. Il abrite un édifice religieux, doté au milieu du siècle d’un clocher-porche. Ce dernier, ainsi que la pointe sud du promontoire, est englobé dans la seconde moitié du XIe siècle dans une vaste enceinte de galets donnant au site sa forme actuelle.

Une tour-maîtresse et une enceinte

Trois logis sont aménagés à l’intérieur, deux au nord et un au sud. Une tour-maîtresse est ensuite perchée sur le clocher-porche à la fin du siècle (ou au début du suivant), avec un escalier en vis desservant ses quatre étages. À la fin du XIIe, ou au début du XIIIe siècle, la défense du site est renforcée, notamment par l’ajout d’une enceinte autour de la haute-cour. L’étude du bâti réalisée entre 2018 et 2023 a porté sur les parties hautes de la tour-maîtresse, sur une partie de l’enceinte interne et sur l’éperon, imposante construction triangulaire accolée au nord. Les observations stratigraphiques, couplées à plusieurs datations radiocarbones, ont permis d’affiner la chronologie des travaux de la fin du XIIe siècle.

L’enceinte intérieure du château : au premier plan la tourelle sud-est et les deux murs de courtine associés ; en arrière-plan la porte de plan coudé et le prolongement de l’enceinte devant la tour‑maîtresse.

L’enceinte intérieure du château : au premier plan la tourelle sud-est et les deux murs de courtine associés ; en arrière-plan la porte de plan coudé et le prolongement de l’enceinte devant la tour‑maîtresse. © C. Chauveau, Hadès, 2019

Des défenses renforcées

L’étude des élévations de la seconde enceinte a montré qu’un énorme éperon triangulaire, de 25 m de hauteur, était appuyé contre la façade nord de la tour-maîtresse. Il comprend deux salles à archères, accessibles depuis le troisième étage de la tour, une latrine au quatrième étage et un espace habitable pourvu d’une cheminée au sommet. À l’intérieur, les défenses sont renforcées par l’installation d’une enceinte flanquée de trois (ou quatre) tours et ceinturant la haute-cour. Elle est percée par une porte au plan coudé. Au nord-est, elle masque la façade orientale de la tour-maîtresse. Les observations indiquent que cette enceinte a d’abord été couronnée par un crénelage autour du donjon et de la porte, ce qui est inédit. La muraille intérieure a ensuite été surélevée pour l’installation d’un hourd, dont les pièces de bois sont encore visibles. Plusieurs morceaux de bois et de charbons pris dans le mortier ont été récupérés dans l’éperon et dans le hourd. Datés par analyse du radiocarbone, ils indiquent que ces travaux prennent place entre la fin du XIIe et le début du XIIIe siècle. Ces derniers se sont donc succédé dans un temps assez court.

L’éperon triangulaire.

L’éperon triangulaire. © C. Chauveau, Hadès, 2020

Lexique

Un hourd est une galerie en charpente établie en encorbellement au sommet d’une muraille ou d’une tour.

Richard Cœur de Lion maître des lieux

Les formes originales utilisées, comme l’éperon triangulaire et le plan coudé de la porte, orientent vers une construction réalisée par Richard Cœur de Lion, maître du château de 1182 à 1199. Les moyens nécessaires et les formes novatrices, issues de modèles normands et d’exemples observés probablement pendant les croisades, favorisent, en effet, une attribution au roi-duc. L’ajout du hourd, ainsi que d’autres renforcements plus ponctuels de la défense comme la surélévation de certaines parties de l’enceinte primitive, pourrait toutefois être attribué à la famille de Mauléon – qui récupère le site à la mort de Richard Cœur de Lion –, notamment à Savary de Mauléon, puissant seigneur poitevin du premier quart du XIIIe siècle.

Passage voûté effondré, situé au troisième étage de la tour-maîtresse, après la fouille.

Passage voûté effondré, situé au troisième étage de la tour-maîtresse, après la fouille. © C. Chauveau, Hadès, 2018

Les témoins d’une occupation élitaire

La fouille réalisée au sein de la tour-maîtresse a consisté à vider un passage voûté effondré au troisième étage. Sa construction remonte à la fin du XIe siècle, en même temps que la tour. Le mobilier céramique retrouvé indique que cet espace est encore occupé aux XIIIe et XIVe siècles, alors que le château perd de son importance. L’opération a également livré un lot représentatif d’os d’animaux. Leur étude signale une consommation de viande d’élevage, apportée au château sous forme de quartiers de viande déjà débités, avec une prédilection pour les morceaux de qualité. Associé à la présence d’espèces rares consommées sur place, comme le dauphin ou le cerf, l’ensemble témoigne du statut aisé des consommateurs et offre une fenêtre sur la vie quotidienne à l’époque médiévale.
Ces données inédites amènent de nouvelles connaissances sur l’évolution et l’occupation du château de Talmont-Saint-Hilaire tout au long du Moyen Âge. Elles montrent tout l’intérêt de l’archéologie du bâti dans le cadre du suivi de restaurations de monuments historiques et que les découvertes sont toujours possibles sur un château de cette importance !