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Une nécropole de gloire et d’épées à Creuzier-le-Neuf dans l’Allier

Mobilier métallique découvert dans la sépulture 990 : fibule, anneaux de ceinture et épée.

Mobilier métallique découvert dans la sépulture 990 : fibule, anneaux de ceinture et épée. © Flore Giraud, Inrap

En 2022, une vaste nécropole celtique était mise au jour par ­l’Inrap à Creuzier-le-Neuf, non loin de Vichy. Si l’acidité des sols a fait fondre les ossements rendant l’identification des défunts impossible, elle n’a pas entamé les vestiges en métal, et en particulier deux impressionnantes épées en fer protégées par leur fourreau en bronze ciselé.

Menée avant l’aménagement de la ZAC des Ancises, la fouille préventive a dévoilé une occupation mille-feuille allant du Néolithique au Moyen Âge.

Une aire funéraire de la période celtique

Mais c’est la période celtique qui a retenu l’attention des archéologues avec une aire funéraire remontant au IVe siècle avant notre ère (soit au début du second Âge du fer) et regroupant sur près de 650 m2 une petite centaine de tombes. Cet enclos quadrangulaire de 30 m de côté, ceinturé d’un fossé et d’une palissade (disparue), était doté d’un système d’entrée, dans une véritable volonté de monumentalisation de la part de ceux qui l’ont conçu et qui s’y sont doute fait enterrés par la suite. En son sein, mise à part une crémation accompagnée d’un ravisant petit vase à libations, les nombreuses sépultures à inhumations (hommes, femmes et enfants) se superposent pendant environ une génération. Or seules celles contenant du mobilier métallique ne sont pas recoupées par d’autres. Pourquoi ? Appartenaient-elles à des personnes plus importantes et auraient-elles été signalées en surface ? À cette époque, la tradition des tumulus a disparu, mais les personnes de haut rang semblent toujours partir dans le monde des défunts avec un riche mobilier et entourés des leurs.

Vase funéraire découvert dans la sépulture à crémation.

Vase funéraire découvert dans la sépulture à crémation. © Flore Giraud, Inrap

Panoplie aristocratique

Ce sont justement ces objets métalliques (en fer ou alliage cuivreux) qui ont intéressé les spécialistes : des bracelets, uniques ou par paire, en simple tige enroulée ou plus ouvragés, dix-huit fibules (parfois très dégradées et stabilisées au laboratoire du CREAM à Vienne) et surtout deux épées, rendant l’ensemble exceptionnel. Prélevées dans leur gangue de terre, elles sont également passées entre les mains expertes des restaurateurs du CREAM. La plus petite (sépulture 782) est sans conteste la plus spectaculaire : sa poignée et la plaque avant du fourreau sont recouverts d’un décor d’ailettes, de volutes et d’ocelles (datable des années 400-380 avant notre ère et très proche de celui des fibules et du vase à libation), et ornés de plusieurs cabochons en pâte de verre. La radiographie de la seconde épée (tombe 900), tout aussi impressionnante, a révélé que sa lame a été incisée de motifs astrologiques (lune et soleil) incrustés en or. Elle était également pourvue d’anneaux qui permettaient de la suspendre à la taille et sans doute de la caler contre la cuisse du cavalier. Bi-matière (recto en alliage cuivreux et verso en fer), les deux fourreaux ont conservé des restes organiques : textiles, issus du linceul ou du vêtement du défunt, os, bois voire ivoire, que les analyses ultérieures permettront de mieux qualifier. Uniques à plus d’un titre, ces épées ont été réalisées pour une élite implantée au carrefour des territoires arverne, éduen, et biturige, dont on ne connaît pas encore le site d’habitats. Quoi qu’il en soit, sa volonté de se distinguer a perduré jusqu’à nous…

Épée courte à poignées à antennes découverte dans la sépulture 782.

Épée courte à poignées à antennes découverte dans la sépulture 782. © Flore Giraud, Inrap