L’art autrement : regards choisis sur l’art.

 

Jean-Pierre Babelon tire sa révérence : l’hommage de Pierre Curie

Jean-Pierre Babelon. © Académie des Inscriptions et Belles-Lettres
Jean-Pierre Babelon. © Académie des Inscriptions et Belles-Lettres

Une grande figure du petit monde des musées vient de s’éteindre. Directeur du musée et du domaine national de Versailles et de Trianon, président de la Fondation Jacquemart-André de Paris à partir de 1997, puis de la Fondation Jacquemart-André (Paris et Chaalis), l’Académicien Jean-Pierre Babelon s’est éteint le 2 février dernier à l’âge de 92 ans. Pierre Curie, conservateur du musée parisien depuis 2016, rend hommage à cet insigne spécialiste de l’histoire moderne.

Les hommages parus à l’occasion du décès de Jean-Pierre Babelon (1931-2024) ont rappelé sa carrière remarquable d’archiviste paléographe et de conservateur qui l’a conduit des Archives nationales au château de Versailles, qu’il a dirigé de 1989 à 1996. Fils et petit-fils de numismates (Jean et Ernest Babelon), Jean-Pierre Babelon aurait pu suivre cette tradition familiale à l’École des chartes, mais il préféra s’intéresser à l’architecture urbaine parisienne et à une époque en particulier, celle des Guerres de religion et du début du XVIIe siècle. Tiré de sa thèse, son ouvrage Les demeures parisiennes sous Henri IV et Louis XIII (1965) reste un modèle du genre. Mais Jean-Pierre Babelon a également nourri une réflexion plus large dans son engagement quotidien au sein de plusieurs instances administratives, réflexion qui a pris forme en 1980 dans un ouvrage co-écrit avec André Chastel, La notion de patrimoine, fort judicieusement réédité récemment (Liana Levi, 2022). Des Mélanges ont été publiés en 2014 en son honneur par le château de Pau et la société Henri IV dont il avait été l’un des initiateurs et le premier président en 1993.

La Renaissance de Jacquemart-André

En 1992, l’Institut de France, où Jean-Pierre Babelon venait d’être élu à l’Académie des Inscriptions et Belles Lettres, lui confia la direction de la Fondation Jacquemart-André au sein de laquelle il allait désormais déployer l’essentiel de son activité. À Paris, il initia le renouveau du musée et, avec le conservateur Nicolas Sainte Fare Garnot, lança d’importantes campagnes de restauration des œuvres, régulièrement suivies par son ami Michel Laclotte. La plus spectaculaire portait sur les fresques de Tiepolo : commencée en 1998 avec la Réception d’Henri III à la villa Contarini, marouflée au sommet du célèbre escalier double, elle s’achèvera en 2024 avec les plafonds du salon de thé et du boudoir. À Chaalis, non seulement il entreprit et supervisa la restauration des fresques de Primatice de la chapelle Sainte-Marie sur lesquelles il publia un très bel ouvrage, en 2007, mais il accompagna aussi la création du Sentier des écrivains et des Journées de la rose, un évènement très populaire qui attire chaque année près de 15 000 visiteurs. Il fallait l’y voir présider avec sa gentillesse légendaire le jury du concours botanique, toujours grand et élégant, en costume clair et cravaté de rose, l’œil pétillant de joie à l’ombre de son panama.

Giambattista Tiepolo (1696-1770), Henri III reçu à la Villa Contarini, vers 1745. Fresque marouflée sur toile, 402 x 729 cm. Paris, musée Jacquemart-André. © Musée Jacquemart-André
Giambattista Tiepolo (1696-1770), Henri III reçu à la Villa Contarini, vers 1745. Fresque marouflée sur toile, 402 x 729 cm. Paris, musée Jacquemart-André. © Musée Jacquemart-André

Pierre Curie
Conservateur du musée Jacquemart-André

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