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Disparition de Paule Ameline : une relieuse entre tradition et modernité

Paule Ameline (1934-2025) dans les années 1970.

Paule Ameline (1934-2025) dans les années 1970. © DR

Le 29 mars dernier, Paule Ameline s’en est allée discrètement, fidèle à son image… Elle avait 91 ans. Elle va désormais pouvoir retrouver son alter ego Claude Honnelaître, disparue il y a 20 ans.

S’inscrire durablement dans le paysage de la reliure française n’est pas chose facile. Paule Ameline a su trouver sa place, parallèlement à son brillant enseignement. Elle n’a pas cherché à s’imposer, mais elle a gagné peu à peu la confiance de nombreux bibliophiles, sans doute dans un premier temps par sa parfaite technicité. Façonnière exigeante, elle s’est frottée d’abord à la reliure janséniste, puis la découverte de certains cuirs comme le box lui a ouvert de nouveaux horizons. Par petites touches, elle a commencé à investir le domaine des décors, tout en confiant leur réalisation à d’illustres doreurs.

Entre équilibre et déséquilibre

Son travail nous démontre aujourd’hui qu’outre son exigence elle a su trouver son style entre équilibre et déséquilibre ; tout semble en lévitation comme si le temps s’était arrêté… La plupart des cuirs peuvent être utilisés dès lors qu’ils servent la composition, en mosaïque incrustée, élaguée… La confrontation de ces peaux, du reptile à l’autruche, de l’éléphant au galuchat, pourrait heurter le regard, et c’est tout le contraire qui se produit : grâce à une mise en espace raffinée et une charte des couleurs judicieuse, les éléments s’assemblent et occupent leur juste place. Certaines pièces décoratives participent plus que d’autres à cette mise en scène, je pense particulièrement aux pièces de cuir et aux papiers aérographiés qui nous transportent dans des univers très contemporains.

Entre tradition et modernité

N’oublions pas que ses nombreuses recherches sont avant tout au service du livre ; pour preuve, le titre présent sur chaque réalisation, sans exception. Paule Ameline voyageait entre tradition et modernité, entre exigence et rêverie, et toute son œuvre peut se résumer en un seul mot : sincérité. Depuis sa retraite, elle s’était totalement éloignée du métier, comme si la page était définitivement tournée. Il reste le catalogue de sa seule rétrospective à la Bibliothèque historique de la Ville de Paris, organisée en 2003, que je vous encourage à vous procurer (Paule Ameline, Dix ans de reliures, 1992-2002) pour découvrir son œuvre et combien le mot style à un sens.

À lire : Paule Ameline : la reliure à décor mosaïqué, un art subtil, Art & Métiers du Livre n° 268