Cimabue, aux origines de la peinture italienne (5/10). La Madone à l’Enfant d’Assise

Cenni di Pepo, dit Cimabue, Madone à l’Enfant avec saint François et quatre anges (détail), fin des années 1280 (?). Fresque. Assise, église inférieure de la basilique San Francesco. © akg-images
Vers la fin des années 1280, Cimabue participe à l’ambitieux chantier de la basilique San Francesco d’Assise, qui fait appel aux peintres de la péninsule pour rendre honneur au saint fondateur de l’ordre franciscain et à son lieu de sépulture. La fresque représentant la Vierge à l’Enfant, accompagnée de quatre anges et de saint François, se trouve dans le transept droit.
La Vierge à l’Enfant entourée d’anges de la basilique d’Assise décline un thème familier à Cimabue, qu’il explore ici à travers la technique de la fresque. Jésus, assis sur les genoux de la Vierge, saisit un pan de la robe de sa mère. Marie, qui lui caresse le pied, se tient sur un trône en bois sculpté, au dossier orné d’un luxueux drap d’honneur. Bien que moins monumental que le trône de la Maestà du musée du Louvre, celui de la fresque d’Assise présente la même tentative d’ancrage dans l’espace : la vision frontale se combine avec une vue de biais, en diagonale, créant ainsi une illusion de profondeur architecturale. Autour du siège sont disposés les anges, qui l’effleurent de leurs doigts allongés, suggérant une prise. Deux anges se trouvent à l’avant, reposant sur la base du trône, et les deux autres sont surélevés à l’arrière, contribuant à la construction spatiale de l’image. Les deux groupes inclinent la tête alternativement vers la droite et vers la gauche, suivant un rythme proche de celui de la Maestà de Santa Trinità.
Cenni di Pepo, dit Cimabue, Madone à l’Enfant avec saint François et quatre anges, fin des années 1280 (?). Fresque. Assise, église inférieure de la basilique San Francesco. © akg-images
« Il s’agit de l’une des plus anciennes représentations [de] saint [François], dont le corps, inhumé dans la basilique inférieure, était devenu un but de pèlerinage majeur. »
Le symbole de la dévotion franciscaine
L’iconographie de la Vierge en majesté était très appréciée par les franciscains en raison de leur attachement à Marie, intermédiaire entre le Christ et les hommes. Pour cet ordre mendiant, Cimabue a également réalisé la Maestà du Louvre, à l’origine destinée à l’église San Francesco de Pise. Dans la fresque de la basilique inférieure d’Assise, saint François est placé à droite de la Vierge à l’Enfant. Il figure debout, dans une position frontale, tenant un livre. Ses mains et ses pieds portent la trace des stigmates, tandis que la blessure au flanc se révèle sur la tunique déchirée, soulignant sa sainteté. Il s’agit de l’une des plus anciennes représentations du saint, dont le corps, inhumé dans la basilique inférieure, était devenu un but de pèlerinage majeur. La fresque de Cimabue, réalisée à la fin des années 1280, période où le peintre était également actif dans la basilique supérieure, rappelait aux frères d’Assise et aux pèlerins les origines de l’ordre franciscain ainsi que l’amour profond de saint François pour la Vierge. Symbole de la dévotion franciscaine, l’image est intégrée et conservée par Giotto au sein du cycle de fresques qu’il peint pour ces lieux, sur la même paroi, quelques années plus tard. Parallèlement, les nombreuses retouches et restaurations auxquelles la fresque de Cimabue a été soumise témoignent de l’exceptionnalité de cette œuvre et de l’importance de sa préservation pour l’ordre franciscain. Ces interventions ont hélas considérablement réduit les traces des coups de pinceau originels.
« Revoir Cimabue. Aux origines de la peinture italienne », du 22 janvier au 12 mai 2025 au musée du Louvre, aile Denon, 1er étage, 75001 Paris. Tél. 01 40 20 53 17. www.louvre.fr
Catalogue sous la direction de T. Bohl, coéd. musée du Louvre éditions / Silvana Editoriale, 256 p., 170 ill., 42 €
Sommaire
Cimabue, aux origines de la peinture italienne
5/10. La Madone à l’Enfant d’Assise
9/10. De Cimabue à Giotto : un héritage florentin (à venir)
10/10. Amours et désamours : l’artiste et la France (à venir)