Découverte en avant-première de l’année « Cezanne 2025 » à Aix-en-Provence

Bastide du Jas de Bouffan.

Bastide du Jas de Bouffan. Photo service de presse. © M. Fraisset

Alors que l’année 2006 marquait le centenaire de la mort de Paul Cezanne (1839-1906), en 2025, Aix-en-Provence célèbre à nouveau le peintre en mettant l’accent sur les liens très forts qu’il a entretenus toute sa vie avec sa région et sa ville natale ; il venait constamment s’y ressourcer. En cette année anniversaire, un parcours dédié proposera de visiter tous les sites cezanniens y compris ceux qui sont habituellement fermés au public : l’atelier des Lauves, les carrières et le cabanon de Bibémus et la bastide du Jas de Bouffan.

En point d’orgue de cette année exceptionnelle, le musée Granet déploiera l’exposition « Cezanne au Jas de Bouffan » du 28 juin au 12 octobre 2025. Une centaine d’œuvres du maître feront le voyage depuis les États-Unis, le Canada, le Japon, la Grande Bretagne, la Hongrie, la Suisse…, tandis que le musée d’Orsay, partenaire privilégié de l’événement, prêtera 5 chefs-d’œuvre, dont Les Joueurs de cartes et la Femme à la cafetière.

40 ans de la vie de Cezanne

130 œuvres (huiles sur toile, dessins, aquarelles) seront ainsi exceptionnellement réunies sur le thème du Jas de Bouffan, demeure familiale de la famille Cezanne située à la périphérie de la ville d’Aix et acquise en 1859. Paul, qui y passa la plus grande partie de son existence, y puisa souvent son inspiration, jusqu’à sa vente en 1899 après la mort de son père Louis-Auguste en raison d’une indivision familiale. Propriété de la municipalité et en cours de restauration depuis plusieurs années, cette splendide bastide du XVIIIe siècle ouvrira ses portes à l’été. C’est là que Cezanne a peint ses premiers tableaux à l’âge de 20 ans, il se lança même dans la réalisation d’un décor couvrant les murs du grand salon, dont on découvrit les fragments en août 2023 sous une couche d’enduit. Les amateurs pourront donc visiter le Jas de Bouffan, avant ou après être allés admirer au musée Granet les toiles qui y furent peintes montrant la maison, ses habitants, les terres environnantes, le bassin, ou encore la ferme attenante. Le parcours de l’exposition démarrera avec les premières années, entre 1860 et 1870, la période « couillarde » ; des sections thématiques déployeront ensuite des portraits et autoportraits, des paysages, des paysans du Jas de Bouffan et des natures mortes, pour s’achever sur le motif des baigneurs et des baigneuses.

Paul Cezanne (1839-1906), Nature morte au plat de cerises, 1885-1887. Huile sur toile, 50,17 x 60,96 cm. Los Angeles, Los Angeles County Museum of Art.

Paul Cezanne (1839-1906), Nature morte au plat de cerises, 1885-1887. Huile sur toile, 50,17 x 60,96 cm. Los Angeles, Los Angeles County Museum of Art. Photo service de presse. © 2024 Museum Associates / LACMA. Licenciée par Dist. GrandPalaisRmn / image LACMA

Nouvelles découvertes

Plusieurs découvertes ont été faites en restaurant la bastide et durant la préparation de l’exposition. On peut, par exemple, affirmer aujourd’hui que les Joueurs de cartes du musée d’Orsay ont été peints dans le grand salon du Jas de Bouffan et non pas dans la ferme attenante. En effet, le bas lambris en faux bois du décor de la pièce correspond à celui des Joueurs de cartes. De même, dans la version du tableau conservée au Courtauld Institute de Londres, on distingue une tache rouge qui est celle du Christ aux limbes d’Orsay, œuvre de jeunesse jadis accrochée dans ce salon.

Paul Cezanne (1839-1906), Les Joueurs de cartes, entre 1890 et 1895. Huile sur toile, 47 x 56,5 cm. Paris, musée d’Orsay.

Paul Cezanne (1839-1906), Les Joueurs de cartes, entre 1890 et 1895. Huile sur toile, 47 x 56,5 cm. Paris, musée d’Orsay. Photo service de presse. © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt

Le Jas de Bouffan (re)devient la « Maison de Cezanne »

Ce lieu cezannien par excellence rouvre enfin ses portes à l’été, même si la restautation en cours se poursuivra jusque dans le courant de l’année 2026. Classés au titre des Monuments historiques, l’élégante bastide familiale et son parc (il subsiste aujourd’hui près de 5 hectares quasi intacts sur les 15 qui existaient du vivant de l’artiste) ont pour vocation de devenir la « Maison de Cezanne ». Si l’on connaît bien la douzaine de compositions murales qu’il avait exécutées au rez-de-chaussée et qui furent peu à peu déposées et dispersées, la restauration qui s’achève a permis de révéler, sous les couches de peinture, un trésor insoupçonné : un fragment de décor (6 m2) représentant probablement l’entrée d’un port, dont on ignorait jusqu’alors l’existence.

Certes, l’ensemble ne paie pas de mine : particulièrement lacunaire, la fresque révélée a en effet disparu aux quatre cinquièmes. Cezanne lui-même avait décidé d’en occulter la partie centrale en peignant par-dessus une scène inspirée du peintre Nicolas Lancret (1690-1743) représentant un jeu de cache-cache (Hiroshima, Nakata Museum). Ainsi, seuls les contours de l’œuvre initiale sont aujourd’hui visibles : on distingue de part et d’autre des encadrements d’architectures dominés par un large ciel brumeux dans lequel flottent des oriflammes accrochés au mat d’un bateau. On devine ici la représentation d’un port, probablement inspirée par une gravure de Claude Gellée dit « le Lorrain » (1600-1682). Le jeune artiste rend ici hommage à l’un de ses maîtres anciens favoris.

Certes, l’ensemble ne paie pas de mine : particulièrement lacunaire, la fresque révélée a en effet disparu aux quatre cinquièmes. Cezanne lui-même avait décidé d’en occulter la partie centrale en peignant par-dessus une scène inspirée du peintre Nicolas Lancret (1690-1743) représentant un jeu de cache-cache (Hiroshima, Nakata Museum). Ainsi, seuls les contours de l’œuvre initiale sont aujourd’hui visibles : on distingue de part et d’autre des encadrements d’architectures dominés par un large ciel brumeux dans lequel flottent des oriflammes accrochés au mat d’un bateau. On devine ici la représentation d’un port, probablement inspirée par une gravure de Claude Gellée dit « le Lorrain » (1600-1682). Le jeune artiste rend ici hommage à l’un de ses maîtres anciens favoris. © Ville d’Aix-en-Provence / Philippe Biolatto

Le Centre cezannien de recherche et de documentation

Précisons que la ferme qui jouxte la bastide est également rénovée pour accueillir le Centre cezannien de recherche et de documentation, centre d’envergure internationale ayant notamment la responsabilité du catalogue raisonné. Ce projet ambitieux, porté par la dynamique Société Cezanne, démontre bien l’exceptionnelle vitalité de la recherche autour de l’artiste.

Les Lauves, l’ultime atelier

En 1899, le peintre, âgé de 62 ans, quitte à contrecœur le Jas et fait construire, deux ans plus tard, son ultime atelier sur la colline des Lauves, dans le nord d’Aix-en-Provence. Sauvé en 1954 sous l’impulsion des biographes américains de Cezanne, James Lord et John Rewald, le lieu est finalement acquis par la Ville. Désireuse d’améliorer l’accessibilité de ce site insigne et intimiste, la municipalité a acquis en 2016 un terrain voisin. L’été prochain, l’espace qui rouvrira ses portes sera donc entièrement dédié à l’atelier, niché dans le bucolique jardin restitué au plus près de ce qu’il était du temps de Cezanne.

Intérieur de l’atelier de Cezanne sur la colline des Lauves à Aix-en-Provence.

Intérieur de l’atelier de Cezanne sur la colline des Lauves à Aix-en-Provence. Photo service de presse. © Ville d’Aix-en-Provence / J.-C. Carbonne

Autour de Cézanne

Cette année-événement a fédéré de nombreux acteurs de la vie culturelle aixoise. Le musée du Vieil Aix proposera ainsi une plongée dans la ville qu’a connue le peintre au gré de l’exposition « Aix et Cezanne », qui y sera déployée du 6 juin 2025 au 5 janvier 2026. On y croisera des proches de l’artiste, des émules mais aussi des détracteurs, comme les adeptes du pleinairisme Joseph Ravaisou et Édouard Ducros. Le Pavillon Vendôme reviendra, quant à lui, sur deux manifestations consacrées à Cezanne entre ses murs avec « L’expo des expos – Cezanne au Pavillon Vendôme en 1956 et 1961 ». Photographies, articles de presse et réalité virtuelle inviteront à revivre ces deux manifestations, du 19 juin au 2 novembre 2025.

À hauteur d’enfants

Les plus petits ne seront pas en reste ! À partir de 3 ans, ils seront les bienvenus à La Manufacture pour découvrir l’exposition totalement participative et sur-mesure qui a été imaginée pour eux. La petite galerie Cezanne, ouverte du 4 février au 12 octobre 2025, permettra aux enfants de jouer, regarder et comprendre !

« Cezanne au Jas de Bouffan », du 28 juin au 12 octobre 2025 au musée Granet, place Saint-Jean de Malte, 13100 Aix-en-Provence. Ouvert du lundi au dimanche de 9h à 19h, sauf le jeudi de 12h à 22h. Retrouvez toutes les informations sur www.cezanne2025.com

La billetterie ouvre dès le 9 décembre 2024 : granet-reservation@mairie-aixenprovence.fr

Bastide du Jas de Bouffan, 4 route de Valcros, 13090 Aix-en-Provence. Ouvert du au 12 octobre 2025, du lundi au dimanche, de 9h à 19h.
Atelier des Lauzes, 13 avenue Paul Cezanne, 13090 Aix-en-Provence. Ouvert du au 12 octobre 2025, du lundi au dimanche, de 9h à 19h.
Les carrières de Bibémus, 3090 chemin de Bibémus, 13100 Aix-en-Provence. Ouvert uniquement lors des visites guidées et excursions.
La petite galerie Cezanne, du 4 février au 12 octobre 2025 à La Manufacture, 8-10 rue des Allumettes, 13100 Aix-en-Provence. www.lamanufacture-aix.fr