Les chefs-d’œuvre du musée Nissim de Camondo s’exposent à FAB Paris

Le musée Nissim de Camondo à Paris. © Les Arts Décoratifs / Jean Tholance
Actuellement fermé pour travaux, le musée Nissim de Camondo est l’invité d’honneur de la troisième édition du Salon FAB Paris. En marge de ce salon, les visiteurs pourront admirer quatre-vingts chefs-d’œuvre issus de ses collections. Originaire d’une famille juive sépharade d’Espagne exerçant dans le domaine de la banque, Moïse de Camondo (1860-1935) voue une passion sans limite à l’art du XVIIIe siècle, avec une prédilection pour les styles Transition et néoclassique. Collectionneur érudit, il réunit autour de lui près de 4 000 œuvres (boiseries, meubles, tableaux, sculptures, porcelaines, orfèvrerie et objets d’art) de très grande qualité, souvent de provenance royale.
À partir de 1911, il fait appel à René Sergent pour la construction, rue de Monceau, d’un écrin inspiré du Petit Trianon afin d’abriter ses merveilles. Grand philanthrope, il souhaite également que sa demeure devienne un musée après sa mort. Il lègue à l’État en 1935 l’hôtel et ses collections et en confie la gestion à l’Union centrale des Arts décoratifs. Ce musée, baptisé Nissim de Camondo en mémoire de son fils, mort en combat aérien en 1917, ouvre au public dès 1936 et permet, encore aujourd’hui, d’admirer à travers les yeux de son créateur « cet art décoratif qui a été une des gloires de la France ».
Une volière sur porcelaine
Le XVIIIe siècle consacre la naissance des sciences naturelles comme discipline scientifique. C’est ainsi qu’entre 1749 et 1789, Georges-Louis Leclerc, comte de Buffon, publie une Histoire naturelle, générale et particulière, avec la description du Cabinet du Roy en 36 volumes. Conséquence imprévue par l’auteur, cet ouvrage encyclopédique servira également de source d’inspiration majeure pour les artistes de la Manufacture de porcelaine de Sèvres. Entre 1782 et 1796, pas moins de quinze « services Buffon » sortent de ses fours et retiennent, à partir de 1898, l’attention de Moïse de Camondo, qui en possède environ 350 pièces.

Pièces du service Buffon, Manufacture royale de Sèvres, 1784, 1785, 1787 et 1792. Porcelaine tendre et dure. © Les Arts Décoratifs / Jean Tholance
L’œil du collectionneur
Lorsque Moïse de Camondo achète cette élégante bouteille à saké en 1922, il ignore tout de sa provenance royale, preuve qu’il se fie davantage à son propre goût, affiné au fil des années, qu’au pedigree des pièces qu’il acquiert. Cette bouteille en laque ornée de feuilles de paulownia utilisée lors des cérémonies shinto a en effet appartenu à Madame de Pompadour, avant d’être sublimée, en 1783, par une délicate monture en bronze doré de François Rémond, sans doute à l’initiative d’un marchand mercier.

François Rémond (1747-1812), bouteille à saké ayant appartenu à Madame de Pompadour, Japon, époque d’Edo, avant 1764 (bouteille), 1783 (monture). Bronze fondu, ciselé et doré, bois laqué noir, décor en maki-e d’or, d’argent et d’étain, H. 46,2 cm ; D. 28,2 cm. © Les Arts Décoratifs / Christophe Dellière
Un rare exemple du goût rocaille
Cette encoignure est l’un des rares témoignages du goût de Moïse de Camondo pour les formes chantournées du style rocaille et atteste du goût du Siècle des Lumières pour l’exotisme et les chinoiseries. Le vantail galbé est en effet orné d’un panneau de laque du Japon à décor de paysage, sans doute prélevé sur un paravent ou un coffre venu d’Extrême-Orient et adapté par BVRB sur un meuble occidental. Afin d’uniformiser le décor, les côtés et la traverse inférieure sont rehaussés d’un vernis parisien à l’imitation du laque.

Bernard II Vanrisemburgh dit BVRB (né avant 1705-1766), encoignure (d’une paire), vers 1750. Chêne plaqué de laque du Japon et verni, bronze ciselé et doré, dessus en marbre griotte rouge, 92 x 72 x 93 cm. © Les Arts Décoratifs / Jean Tholance
L’inventivité des marchands merciers
Achetée par Moïse de Camondo pour 280 000 francs, cette petite table de dame à gradin illustre bien le raffinement de l’ébénisterie française au XVIIIe siècle. Sur une structure de style Transition, Martin Carlin appose dix-sept plaques en porcelaine tendre de Sèvres décorées de bouquets et de guirlandes de fleurs. Cette idée originale revient au marchand mercier Simon-Philippe Poirier et s’inscrit dans une démarche de recherche permanente de nouveautés susceptibles de plaire à une clientèle fortunée.

Martin Carlin (1730-1785), table à gradin dite bonheur-du-jour, vers 1766-1770. Bâti en chêne, placage de bois de rose, d’érable ondé, d’ébène et d’amarante, bronze ciselé et doré, plaques en porcelaine tendre de Sèvres, 81 x 67 x 42 cm. © Les Arts Décoratifs / Jean Tholance
Un chef-d’œuvre de provenance royale
Cette paire de vases est exceptionnelle par la rareté de son matériau, du bois pétrifié. Il s’agit d’une matière fossile, qui conserve la structure originale du bois, mais où toute trace de matière organique a été remplacée par des minéraux. Leur forme d’urne antique est mise en valeur par une monture en bronze doré de très grande qualité, due au talent de François Rémond. Leur inspiration néoclassique a su séduire la reine Marie-Antoinette, qui les avait placés dans la salle de bain de son appartement à Versailles.

François Rémond et Ange Joseph Aubert (1736-1785), paire de vases couverts, 1784. Bronze fondu, ciselé et doré, bois pétrifié, 43 x 18 x 16 cm. © Les Arts Décoratifs / Christophe Dellière
Musée Nissim de Camondo, 63 rue de Monceau, 75008 Paris. Tél. 01 53 89 06 40. www.madparis.fr





