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Monaco et les Napoléon(s) : une aventure humaine racontée au Grimaldi Forum

Vue de l'exposition « Monaco & les Napoléon(s). Destins croisés ».

Vue de l'exposition « Monaco & les Napoléon(s). Destins croisés ». © rhino.production / picturesandyou06

Cet été, le Grimaldi Forum met en avant un pan méconnu de l’histoire de la principauté : les liens forts qui ont existé entre la dynastie napoléonienne et la famille Grimaldi durant tout le XIXe siècle. À travers près de 180 objets, dont de nombreux prêts de la collection Iakobachvili, l’exposition revient à la fois sur les relations personnelles entre les souverains et sur les conséquences politiques qu’elles ont pu avoir.

Annexé en 1793, Monaco fait pleinement partie de l’Empire napoléonien, avant de retrouver sa souveraineté à la chute de ce dernier. Alors que le futur Honoré V, qui fut baron d’Empire et grand écuyer de Joséphine, rentre chez lui, il rencontre fortuitement près de Cannes l’empereur déchu qui tente de reconquérir son trône, une anecdote qui sera largement romancée par Alexandre Dumas. Le Rocher fait face à de nouvelles difficultés en 1848 avec la sécession de Menton et de Roquebrune, avant de nouer une importante alliance avec Napoléon III en 1861. Charles III puis Albert Ier entretiennent ainsi des relations politiques mais aussi plus personnelles avec le couple impérial. Familiers des fastes du Second Empire, ils auront à cœur de faire de la principauté un centre artistique et culturel de premier plan, le « petit Paris » de la Belle Époque.

Thomire, un bronzier virtuose

Ce grand candélabre à douze lumières accueillait en son centre une composition florale. On y retrouve toutes les caractéristiques du travail de son auteur, le bronzier Pierre-Philippe Thomire : un vocabulaire décoratif néoclassique fait de bacchantes, de palmettes et de guirlandes de fleurs opulentes, une ciselure raffinée, un jeu subtil sur les mats et les brillants. Formé auprès de Houdon et de Gouthière, Thomire devient ciseleur de l’empereur en 1809 et livre de nombreuses pièces exceptionnelles pour le couple impérial.

Pierre-Philippe Thomire (1751-1843), candélabre à douze lumières, vers 1810. Bronze doré, 80 x 52 cm.

Pierre-Philippe Thomire (1751-1843), candélabre à douze lumières, vers 1810. Bronze doré, 80 x 52 cm. Photo service de presse. © Musée Collection des Arts – David et Mikhail Iakobachvili

Le chant des oiseaux

Cette cage à l’oiseau chanteur, dont Joséphine possédait un exemplaire similaire à Malmaison, peut être rapprochée de la production de l’horloger suisse Pierre Jaquet-Droz (1721-1790), réputé pour ses automates. Celle-ci dissimule en effet neuf flûtes activées par un soufflet, donnant l’illusion que l’oiseau, dont le bec et la queue sont mobiles, siffle l’une des huit mélodies de son répertoire. Les mécanismes musicaux dissimulés dans des meubles ou des objets d’art témoignent une fois encore du goût des élites pour les pièces alliant technique et poésie. Cette cage est également pourvue d’une horloge, dont le cadran se dévoile lorsque l’on passe sous l’objet suspendu.

Entourage de Pierre Jaquet-Droz (1721-1790), cage avec oiseau chanteur mécanique et horloge, vers 1800. Bronze doré, laiton, émail, plumes, 45 x 29 cm.

Entourage de Pierre Jaquet-Droz (1721-1790), cage avec oiseau chanteur mécanique et horloge, vers 1800. Bronze doré, laiton, émail, plumes, 45 x 29 cm. Photo service de presse. © Musée Collection des Arts – David et Mikhail Iakobachvili

Un présent de choix

Tout comme Louis XIV avant lui, Napoléon Ier offre volontiers des tabatières à son effigie ou à son initiale aux personnes à qui il souhaite exprimer sa faveur. Leur valeur dépend de leur richesse d’exécution : les tabatières au portrait de l’empereur ont plus de valeur que celles décorées d’une initiale et dans les deux cas, le nombre de diamants employés est également un facteur important. Souvent, ces derniers sont vendus – par le récipiendaire lui-même – et remplacés par de la simple pâte de verre. Délicatement ornée de motifs néoclassiques guillochés et émaillés, cette tabatière porte, à l’intérieur du couvercle, la signature de Marguerite, joaillier de la Couronne de leurs Majestés impériales et royales.

Pierre-André Montauban (1763-avant 1819), tabatière de présentation au chiffre de Napoléon Iᵉʳ, 1804-1809. Or, émail, pâtes de verre serties d’argent, 2,4 x 8,7 x 6,1 cm.

Pierre-André Montauban (1763-avant 1819), tabatière de présentation au chiffre de Napoléon Iᵉʳ, 1804-1809. Or, émail, pâtes de verre serties d’argent, 2,4 x 8,7 x 6,1 cm. Photo service de presse. © Musée Collection des Arts – David et Mikhail Iakobachvili

Un objet facétieux

Ce petit pistolet en or émaillé illustre le goût du siècle des Lumières pour les mécanismes ingénieux et les petits objets précieux, goût qui perdure à la cour de France au XIXe siècle. Il s’agit en effet d’un amusant diffuseur à parfum : en appuyant sur la gâchette, on fait s’ouvrir les pétales à l’extrémité du canon, qui dévoile alors le vaporisateur de parfum au cœur de la fleur. Cet exemplaire a été réalisé par la maison d’orfèvrerie genevoise Moulinié, Bautte & Cie, tout comme l’exemplaire très similaire conservé au musée Cognacq-Jay.

Diffuseur de parfum en forme de pistolet avec horloge cachée et clé de remontage, vers 1805. Or, perles, émail, laiton, L. 10,8 cm.

Diffuseur de parfum en forme de pistolet avec horloge cachée et clé de remontage, vers 1805. Or, perles, émail, laiton, L. 10,8 cm. Photo service de presse. © Musée Collection des Arts – David et Mikhail Iakobachvili

Un objet, deux usages

À partir du XVIIIe siècle, le goût croissant pour les sciences se traduit volontiers par le développement d’objets ­multifonctions, aux mécanismes savants et complexes. C’est ainsi que cette clef destinée à remonter les montres de poche dissimule également une petite lunette télescopique. Détail amusant : les fleurettes en acier qui décorent les deux faces de l’objet ne sont pas sans rappeler la forme des pignons, ces roues dentées indispensables au fonctionnement de bon nombre de mouvements horlogers.

Clé de remontage de montre de poche avec longue-vue, vers 1810. Acier, laiton, émail, perles, verre, 4,7 x 3,3 cm.

Clé de remontage de montre de poche avec longue-vue, vers 1810. Acier, laiton, émail, perles, verre, 4,7 x 3,3 cm. Photo service de presse. © Musée Collection des Arts – David et Mikhail Iakobachvili

« Monaco & les Napoléon(s). Destins croisés », jusqu’au 31 août 2025 au Grimaldi Forum Monaco, 10 avenue Princesse Grâce, 98000 Monaco. Tél. 377 99 99 3000. www.grimaldiforum.com

À lire : Catalogue, Silvana Editoriale, 208 p., 35 €.
18th-Century Snuffboxes, The David & Mikhail Iakobchvili Collection, édité par Haydn Williams, 2024, 456 p., 125 £.