Fruit de la fusion entre deux maisons de ventes américaines historiques, Freeman’s Hindman s’impose comme un acteur majeur du marché de l’art. Spécialisé notamment dans la vente d’œuvres et d’objets d’art américains, la maison entend désormais se lancer à la conquête de l’Europe. Entretien avec Raphaël Chatroux, vice-président et directeur du département des arts américains de Freeman’s Hindman.
Propos recueillis par Raphaël Buisson-Rozensztrauch.
Freeman’s a été fondée en 1805 à Philadelphie, Hindman en 1982 à Chicago ; pouvez-vous revenir sur l’histoire de ces deux maisons ?
Ancienne entreprise familiale implantée sur la côte Est, Freeman’s est la plus ancienne maison de ventes du pays. Elle propose principalement des objets
et des peintures ayant trait à l’histoire des États-Unis, de Philadelphie et de la Pennsylvanie. De Philadelphie à Boston en passant par New York, Freeman’s a su se tailler une part importante de ce marché de l’Americana, art naïf ou folk qui entre en résonance avec l’identité patriotique. Plus jeune, Hindman s’est rapidement développée au point de devenir l’un des acteurs majeurs du marché de l’art aux États-Unis, lors de sa fusion en 2018 avec Cowan’s Auctions, basée à Cincinnati. Spécialisée en art moderne et d’après-guerre, la société s’est établie avec succès à Chicago et aux alentours – une région longtemps délaissée par les maisons de ventes américaines.
Au-delà de Chicago et Philadelphie qui sont vos deux pôles principaux, comment vous êtes-vous implanté aux États-Unis ?
Nous allons chercher nos clients hors des zones déjà saturées : nous sommes installés dans dix-huit villes, devenant ainsi la maison qui a le plus de salles de ventes dans le pays, avec de vraies réussites à New York, Cincinnati et Palm Beach notamment. À cela s’ajoutent nos dix-huit bureaux (Scottsdale, Saint-Louis, le Connecticut…), soit deux de plus que Sotheby’s. En ouvrant notre premier bureau à New York en janvier dernier, nous avons montré notre volonté de nous hisser au niveau de la concurrence plus établie ; mais en nous implantant dans des territoires négligés et en offrant un service aussi qualitatif que nos concurrents pour des vacations moins ambitieuses, nous avons clairement emprunté un autre chemin.
Freeman’s Hindman n’a pas caché ses ambitions européennes. De quelle manière comptez-vous investir le vieux continent ?
Cela passe avant tout par notre partenariat avec Lyon & Turnbull, la plus ancienne maison de ventes écossaise installée à Édimbourg. Nous avons récemment collaboré à la vente historique d’une rare copie de la Déclaration d’indépendance américaine, qui a réalisé plus de 4 millions de dollars. Nous comptons également multiplier les expositions en Europe, en particulier à Londres et à Paris, faciliter les mandats de vente entre les deux continents, et pourquoi pas, y travailler de manière plus pérenne.
Outre les départements dédiés aux arts européens, asiatiques et aux antiquités, vous faites la part belle à l’art américain.
En effet, ce domaine fait partie intégrante de l’identité de Freeman’s Hindman. On observe un intérêt pour les premiers paysagistes américains, formés à la manière européenne mais qui s’inscrivent dans une histoire et un territoire local. L’art de l’illustration, qui renvoie à l’image d’une Amérique insouciante à la limite de la Pop Culture, avec des artistes comme Norman Rockwell, est lui aussi de plus en plus recherché. En occupant un marché intermédiaire, nous parvenons à gagner du terrain sur de nouvelles tendances. Je pense notamment au succès que rencontrent dans nos ventes les impressionnistes de Pennsylvanie ou les « Dix de Philadelphie », groupe d’artistes femmes formé en 1917.