
Jean Sala (1869-1918) sort cet été de l’ombre au musée Bernard Boesch de La Baule-Escoublac. Les 70 peintures, dessins et objets issus de la collection réunie par son petit-fils offrent une vision à la fois colorée et sereine d’une Belle Époque fastueuse et encore insouciante.
Né à Barcelone dans une famille d’artistes, Jean Sala est l’un des nombreux peintres étrangers à rejoindre Paris où il expose dès la fin du XIXe siècle. S’imposant bien vite comme un portraitiste en vogue, il immortalise à la fois le Tout-Paris, les hommes politiques et le monde du spectacle. Une véritable galerie de personnages où l’on croise son ami Paul Porel, directeur et metteur en scène de théâtre qui fut l’époux de la célèbre comédienne Réjane, de ravissantes actrices et d’élégantes mondaines auxquelles il dédie de gracieux portraits en pied, ou encore des membres de sa propre famille aux couleurs vibrantes et pleines de tendresse. Il représente ainsi sa femme dans une belle tenue de tennis d’un blanc rayonnant aux reflets irisés.

L’Espagne aimée et romantisée
Jean Sala évoque sa terre natale dans plusieurs de ses toiles ; en 1909, l’exposition « Grenade et ses gitanes par Jean Sala » reçoit de belles critiques et voyage à Londres. La vue onirique qu’offre Rêverie, souvenir de Grenade traduit l’amour du peintre pour son pays. Ses gitanes et scènes de couples véhiculent l’imaginaire romantique et fantasmé de la femme espagnole, aussi indocile que charmante, armée d’une cigarette ou de son éventail, et dont le front est chargé de mèches en accroche-cœur.

Une large palette de styles et de genres
Jean Sala ne se contente pas d’explorer un style ou un sujet. Son Casino à Dieppe fourmillant de joueurs mondains contraste avec les vues calmes et colorées du port de la ville. Il s’essaie à l’allégorie avec Printemps, qui rappelle l’art de Lawrence Alma-Tadema, et à la peinture religieuse ou historique avec sa Mater Amorosa monochrome aux touches rapides qui s’oppose à une Salomé haute en couleur. Ses paysages et ses miniatures détaillées sont emprunts de profondeur et, loin des mondanités, ses scènes de genre populaires au réalisme touchant, comme Mimosa et Marchande de fleurs sur le Pont Neuf, traduisent un bonheur calme et digne.

Un artiste publicitaire
Jean Sala mène aussi une carrière d’illustrateur publicitaire. S’il collabore avec diverses marques, c’est avec la biscuiterie LU qu’il se montre le plus prolifique. Proche de la famille qui l’invite souvent à Nantes, il réalise notamment un dessin touchant dont le sujet n’est autre que la fille de Lucien Lefèvre-Utile partageant un moment de complicité avec sa grand-mère. La portée publicitaire de l’œuvre n’échappe pas à l’homme d’affaires qui la déclinera bientôt sur de multiples supports.
Gaspard Douin
« Jean Sala (1869-1918). Couleurs d’une époque »
Jusqu’au 23 août 2023 au musée Bernard Boesch
35 rue François Bourgouin, 44510 Le Pouliguen
Tél. 02 40 01 53 08
www.labaule.fr/musee-bernard-boesch