1 905 000 € (frais inclus). C’est la somme que vient de débourser le musée du Louvre pour s’offrir hier chez AuctionArt – Rémy Le Fur & Associés un dessin double face au lavis de Francisco de Goya (1746-1828).
Provenant du carnet B, dit « carnet de Madrid », ces deux dessins satiriques sont intitulés La femme demande des comptes au mari et La tante Chorriones allume le feu. Ce dernier se révèle être la toute première apparition d’une sorcière, un motif qui deviendra par la suite récurrent dans l’œuvre de Goya.
Une feuille issue du carnet B
Le carnet B, dont le Louvre détient déjà quatre feuilles, fut dessiné entre 1796 et 1797 lorsque l’artiste espagnol vivait entre Sanlúcar de Barrameda, la résidence de la duchesse d’Albe, et Madrid. Goya y poursuit les réflexions initiées dans l’album A, dit « album de Sanlúcar », et exploite à nouveau un univers très féminin. Si la première partie du carnet B est formellement proche du contenu du précédent, la seconde, dont le feuillet acheté par le Louvre est issu, se distingue par un trait plus énergique et une satire plus acerbe du clergé, annonçant les gravures de Los caprichos (1799). Le dessin au verso, La tante Chorriones allume le feu, constituerait d’ailleurs, une esquisse préparatoire pour la planche Sopla n° 69 de Los capricios.
Démembrement et dispersion
Hérités en 1828 à la mort de Goya par son fils Javier Goya y Bayeu (1784-1854), les « albums privés » passent ensuite en différentes mains, dont celles du peintre Frederico de Madrazo (1815-1894) et du marchand Alfred Strölin (1871-1955). Démembrés ou conservés intacts, selon le bon vouloir de leurs différents propriétaires, ils sont finalement en grande partie dispersés en 1877 durant une vente organisée par l’intermédiaire de Paul Lebas à l’hôtel Drouot.
Simon Poirier