
Deux ans de travaux ont été nécessaires afin de rendre à la spectaculaire coupole rocaille du lycée Henri IV sa beauté depuis longtemps fanée.
Fondée par Clovis en VIe siècle, la puissante congrégation Sainte-Geneviève occupe au XVIIIe siècle, au sein du Quartier latin les murs de ce qui deviendra, un siècle plus tard, notre actuel lycée Henri IV. Bâtie en 1672, la bibliothèque de l’abbaye reçoit en 1710 un volumineux legs de 16 000 ouvrages consenti par l’archevêque de Reims Charles-Maurice Le Tellier (1642-1710), frère cadet du marquis de Louvois, qui va susciter le lancement d’un projet d’extension. C’est l’architecte Jacques de la Guépière (mort en 1734) qui conduira les travaux en doublant la surface d’origine à l’aide d’une seconde galerie venant couper à angle droit la première.
Un décor à la gloire du jansénisme
Large de 10 mètres, l’imposante coupole qui relie dès lors les deux bras de la bibliothèque reçoit en 1730 une vaste composition à l’huile sur enduit exécutée par Jean Restout (1692-1768), L’Apothéose de saint Augustin terrassant l’hérésie. En pleine querelle janséniste, le plus fameux peintre religieux du règne de Louis XV livre une œuvre militante qui, conformément à ses convictions, prend clairement le parti des disciples de Jansénius et de saint Augustin, qui avait également les faveurs des moines de Sainte-Geneviève. Le saint y est représenté assis sur des nuages supportés par des anges, tandis que dans la partie inférieure de la peinture un dard de feu foudroie les écrits du théologien Pélage, considérés comme hérétiques par saint Augustin.

3,2 millions d’euros de travaux
Jamais restauré jusqu’alors, ce décor insigne avait progressivement perdu sa lisibilité. Les couleurs avaient de longue date perdu leur fraîcheur et l’ensemble était menacé par des désordres provenant du toit. Vraisemblablement exécutées d’après des dessins de Restout, les délicates têtes d’angelots en stuc s’épanouissant au milieu de décors végétaux étaient de leur côté très dégradées. Débutés en juillet 2020 sous la maîtrise d’ouvrage de la Région Île-de-France, des travaux portant à la fois sur l’architecture, le décor peint, les parties sculptées et les vitraux ont été conduits grâce à une enveloppe de 3,2 millions d’euros, somme en partie réunie grâce à la délégation Île-de-France de la Fondation du Patrimoine qui a notamment pu mobiliser 406 donateurs et obtenir un mécénat de la Fondation TotalEnergies.

Olivier Paze-Mazzi
Pour aller plus loin : Christine Gouzi, « Coupole en détresse » EOA n° 546, pp. 24-25.