
Haute de plus de six mètres, la monumentale Porte de l’Enfer d’Auguste Rodin est sans conteste l’une des œuvres phares du musée d’Orsay. Réalisée à la demande du sculpteur l’année de sa mort, en 1917, cette épreuve en plâtre déposée par le musée Rodin prend place sur la terrasse au fond de la nef dès l’ouverture d’Orsay, en 1986. Étrangement, elle n’est alors pas positionnée dans l’axe de la nef, mais de côté, afin de ménager l’effet de surprise… L’idée de la déplacer pour qu’elle trône enfin en majesté au centre de la terrasse avait germé depuis quelques années déjà dans l’esprit de l’équipe scientifique du musée. Entamée en novembre dernier, cette délicate opération vient tout juste de s’achever et a permis de nettoyer l’œuvre tout en repensant sa présentation.

Deux cents groupes et figures
Revenons aux origines de cette spectaculaire sculpture en haut-relief peuplée de plus de deux cents groupes et figures. Commandée en 1879, elle devait à l’origine servir de porte d’entrée pour un musée des Arts décoratifs qui ne vit jamais le jour, à l’emplacement de l’actuel musée d’Orsay. Inspirée des célèbres portes du baptistère de Florence réalisées au XVe siècle par Ghiberti, cette Porte de l’Enfer illustrant des scènes de la Divine Comédie demeura donc à l’état de projet. Elle va pourtant constituer un exceptionnel réservoir de motifs dans lequel l’artiste puisera durant plus de 30 ans l’inspiration nécessaire à la réalisation de quelques-unes de ses sculptures les plus insignes : Le Penseur, Les Trois Ombres, Le Baiser, Ugolin et ses fils… Plusieurs exemplaires de ces sculptures sont présentés à gauche du plâtre monumental, face à un ensemble de travaux préparatoires, afin de mettre en lumière la richesse et la complexité de cette « œuvre-monde » dans laquelle Rodin laissa s’exprimer toute sa puissance créatrice. Précisons enfin que cette épreuve en plâtre servit à la réalisation de la version en bronze présentée dans les jardins du musée Rodin à Paris.
Myriam Escard-Bugat