Adjugé ! Le meilleur de l’art moderne – Mars/avril 2025

Odilon Redon (1840-1916), Tête de femme rouge, entourée d’une germination de fleurs (détail), vers 1901. Pastel sur papier monté sur carton, 47,5 x 63 cm. Vente Paris, Christie’s, 9 avril 2025. Estimé : 600 000/800 000 € Adjugé : 907 200 € (frais inclus). © Christie's Images Ltd, 2025
Les ventes du printemps ont tenu leurs promesses avec de belles adjudications, dans un contexte politico-économique qui demeure difficile.
Record français pour Toulouse-Lautrec chez Christie’s
Le lot phare de la vente du soir de Christie’s était une œuvre de Toulouse-Lautrec conservée dans une collection particulière depuis 90 ans. Elle a atteint un prix record pour l’artiste en France et représente également l’adjudication la plus haute de l’année. Jane Avril au Divan Japonais est une étude préparatoire pour la très célèbre affiche destinée à promouvoir le cabaret du même nom. Lautrec réalisa cette affiche à la demande d’Édouard Fournier à l’occasion de la réouverture de son fameux cabaret de Montmartre, l’un des cafés-concerts les plus courus de la fin du XIXe siècle. Chroniqueur incontournable de la vie nocturne parisienne, le peintre a représenté au premier plan la célèbre danseuse de cancan, Jane Avril, et à sa droite le critique d’art Édouard Dujardin.
Henri de Toulouse-Lautrec (1864-1901), Jane Avril au Divan Japonais, 1892. Huile sur toile, 82,5 x 64,5 cm. Vente Paris, Christie’s, 9 avril 2025. Estimé : 2,5/3,5 M€ Adjugé : 5 340 000 € (frais inclus). © Christie's Images Ltd, 2025
Un pastel de Redon ressurgit aux enchères
Acquis par le marchand Ambroise Vollard auprès de l’artiste l’année de sa création en 1901, cette œuvre d’Odilon Redon conservée de longue date dans une collection allemande apparaît pour la première fois aux enchères. À partir de 1893, le peintre abandonne les visions cauchemardesques de ses célèbres Noirs et s’adonne à la couleur, exprimant ainsi une vision idéalisée du monde. Le présent pastel est emblématique de son nouveau mysticisme qui influencera plusieurs artistes du groupe des Nabis tels que Maurice Denis et Édouard Vuillard. Redon prône désormais une esthétique qui se détourne du naturalisme pour lui substituer un art transfigurant les émotions.
Odilon Redon (1840-1916), Tête de femme rouge, entourée d’une germination de fleurs, vers 1901. Pastel sur papier monté sur carton, 47,5 x 63 cm. Vente Paris, Christie’s, 9 avril 2025. Estimé : 600 000/800 000 € Adjugé : 907 200 € (frais inclus). © Christie's Images Ltd, 2025
Succès pour une vue de port de Paul Signac
Passionné par la mer, Paul Signac possédait un petit yacht avec lequel il naviguait le long des côtes françaises. Il découvrit Saint-Tropez en 1892 et y acheta cinq ans plus tard sa villa La Hune. En 1906, il fit escale à Marseille. Le Vieux-Port lui inspira cette petite toile aux accents fauves qui affirme l’indépendance de la couleur vis-à-vis de la réalité. Ami de Seurat, Signac embrassa la technique divisionniste dès 1886, juxtaposant librement de petites touches de couleur pure. Pourtant, la présente œuvre fait davantage écho aux peintures réalisées la même année par André Derain, représentant des bateaux sur la Tamise à Londres.
Paul Signac (1863-1935), Marseille, le Vieux-Port, 1906. Huile sur carton entoilé, 26,5 x 35 cm. Vente Paris Drouot, Kâ-Mondo, 4 avril 2025. Estimé : 40 000/60 000 € Adjugé : 165 100 € (frais inclus). © Drouot / Kâ-Mondo
La douceur d’un Picabia impressionniste
Cette toile de Picabia, artiste aux multiples facettes, évoquant davantage un tableau d’Alfred Sisley qu’une œuvre surréaliste, a suscité l’engouement à Drouot. La période postimpressionniste de l’artiste, entamée en 1902, fait en effet l’objet d’une belle redécouverte depuis une vingtaine d’années. Inédit depuis sa vente probable en 1909 – déjà à l’hôtel Drouot – ce tableau lumineux décrit un pont datant du XVIIIe siècle dans la région de Villeneuve-sur-Yonne où Picabia aimait poser son chevalet à l’orée du siècle. Construit par Vauban, ce pont, classé au titre des Monuments historiques depuis 1920, offrait sans nul doute dans la lumière du matin un panorama particulièrement idyllique.
Francis Picabia (1879-1953), Le pont de Pierre-Perthuis, effet de soleil le matin, 1907. Huile sur toile, 73 x 92 cm. Vente Paris Drouot, Thierry de Maigret, 2 avril 2025. Estimé : 80 000/120 000 € Adjugé : 225 400 € (frais inclus). © Drouot / Thierry de Maigret
Le Brésil à l’honneur chez Sotheby’s
La vente de la collection de Niomar Bittencourt a été un succès chez Sotheby’s, la plupart des soixante-neuf lots ayant été adjugés au-dessus de leur estimation. Le bronze O Guerreiro de l’artiste brésilienne Maria Martins – dont le rôle fut très important auprès de Niomar – a suscité une vive bataille d’enchères. Exécutée en 1949, cette sculpture est une version réduite d’une œuvre créée en 1940. Maria Martins se réfugia aux États-Unis pendant la Seconde Guerre mondiale et l’influence d’artistes tels que Jacques Lipchitz fut alors décisive. Elle se mit à utiliser le bronze au lieu du bois pour ses sculptures, afin de réaliser des formes plus complexes, tout en explorant son identité brésilienne.
Maria Martins (1894-1973), O Guerreiro, 1949. Bronze, 47,5 x 31,4 x 5,6 cm. Vente Paris, Sotheby’s, 10 avril 2025. Estimé : 80 000/120 000 € Adjugé : 279 400 € (frais inclus). © Sotheby's Art Digital Studio, 2025
L’univers érotico-surréaliste d’Iván Tovar
Rare aux enchères, le peintre Iván Tovar (né en République dominicaine) est un artiste érudit qu’on classe volontiers parmi les néo-surréalistes. Formé à l’école de son compatriote Gilberto Hernández Ortega – très versé dans le surréalisme –, il a pu observer le travail du Cubain Wifredo Lam et apprécier la poésie de l’Espagnol Federico García Lorca. Installé pour vingt ans à Paris à partir de 1963, il y bénéficie de sa première exposition personnelle en 1969, date d’exécution de notre tableau. Sur un fond sombre caractéristique, l’œuvre met en scène le dispositif d’une machine complexe combinant divers éléments clairement sexués, comme des seins ou des fesses, créant ainsi une étrange et froide atmosphère érotique.
Iván Tovar (1942-2020), La Serrure, 1969. Huile sur toile, 81 x 100 cm. Vente Paris Drouot, Drouot Estimations, 28 mars 2025. Estimé : 60 000/ 80 000 € Adjugé : 212 500 € (frais inclus). © Drouot Estimations