Alexis Bordes expose ses plus belles feuilles printanières

François Boucher (1703-1770), La nymphe surprise (détail). Pastel sur vélin tendu sur châssis, 42 x 70,5 cm. © Galerie Alexis Bordes
Comme un rituel, l’arrivée du printemps et du Salon du Dessin annonce une nouvelle exposition à la galerie Alexis Bordes que domine une remarquable sélection d’œuvres sur papier. L’art français y est particulièrement mis à l’honneur avec Antoine Watteau, Jean-Baptiste Greuze et François Boucher, dont un pastel sur vélin livre de précieuses informations sur son travail de dessinateur.
Installée rue de la Paix depuis 2014, la galerie organise plusieurs expositions thématiques par an et publie de nombreux catalogues documentés.
Tableaux et dessins de la Renaissance au XXe siècle
Ce tour d’Europe en tableaux et dessins nous emmène notamment sur les pas du sculpteur allemand Johann Paul Egell (1691-1752) avec une Étude pour un empereur romain vêtu à l’antique, tenant une épée et coiffé d’une couronne (encre brune et lavis d’encre grise). Cap au sud à la suite de l’Italien Giovanni Battista Tiepolo (1696-1770) avec la puissante plasticité de son Faune et faunesse tenant une corne d’abondance (lavis d’encre brune). Le XXe siècle est quant à lui représenté par un tendre pastel sur papier du Belge Firmin Baes (1874-1945), Jeune mère veillant sur le berceau.
Giovanni Battista Tiepolo (1696-1770), Faune et faunesse tenant une corne d'abondance. Plume, lavis d'encre brune sur traits de pierre noire sur papier vergé filigrané, 23,1 x 35,9 cm. © Galerie Alexis Bordes
Pauline Auzou, virtuose du portrait
La sélection opérée par Alexis Bordes met également en lumière la figure de Pauline Auzou (1775-1835), formée dans l’atelier féminin créé par le peintre d’histoire Jean-Baptiste Regnault qui soutenait, tout comme David, les femmes artistes. Deux portraits – Portrait de jeune homme en buste tournant le regard vers la gauche et Portrait de jeune femme de profil (pierre noire, fusain, estompe et rehauts de craie blanche) – illustrent ici sa virtuosité.
Pauline Auzou (1775-1835), Portrait de jeune femme de profil. Pierre noire, fusain, estompe et rehauts de craie blanche sur papier bleu, 47,5 x 34,5 cm. © Galerie Alexis Bordes
Grands noms du dessin français
Parmi les artistes français mis à l’honneur sur les cimaises de la galerie, trois noms se distinguent particulièrement. Jean-Baptiste Greuze (1725-1805) avec un grand dessin inédit mettant en scène deux hommes, Double académie (pierre noire, estompe, sanguine et rehauts de craie blanche) – elle est, à la connaissance d’Alexis Bordes, l’une des deux seules doubles académies de l’artiste connues, la seconde étant conservée à l’Ermitage ; Antoine Watteau (1684-1721), actuellement exposé en majesté au château de Chantilly, avec une Étude de jeune femme de profil et deux études de mains (sanguine), remarquable exemple de ces esquisses d’après nature que le peintre multipliait comme source infinie d’inspiration pour les différentes poses et expressions de ses figures ; François Boucher (1793-1770) avec un pastel sur vélin, La nymphe surprise, qui pourrait être la reprise, pour un amateur inconnu, d’un tableau peint une dizaine d’années plus tôt et conservé au musée des Beaux-Arts de Dijon.
Antoine Watteau (1684-1721), Étude de jeune femme de profil et deux études de mains. Sanguine sur traits de pierre noire, 18,3 x 11 cm. © Galerie Alexis Bordes
Le pastel selon François Boucher
Comme toute sa génération, François Boucher utilise couramment la technique du pastel pour préparer un tableau. Ayant saisi toutes les possibilités de ce médium auprès de Maurice Quentin de la La Tour – qui choisit pour modèle pour son premier portrait au pastel exposé en 1737 la jeune épouse de Boucher, Marie-Jeanne Buseau –, l’artiste se met à exécuter des pastels « finis », sur des papiers épais ou sur du parchemin, qui peuvent rivaliser avec la peinture. La Nymphe surprise exposée chez Alexis Bordes en est un exemple. Datée de 1754, « cette œuvre reprend pour un amateur inconnu un tableau qu’il a peint en 1742 si l’on en croit la date portée sur la toile identique conservée au musée de Dijon », souligne Françoise Joulie, ancienne chargée de mission au département des Arts graphiques du musée du Louvre et spécialiste de l’artiste.
François Boucher (1703-1770), La nymphe surprise. Pastel sur vélin tendu sur châssis, 42 x 70,5 cm. © Galerie Alexis Bordes
On y voit la nymphe Idaea presque entièrement nue, surprise par le jeune dieu Scamandre caché dans les roseaux. « Un examen très poussé mené par la restauratrice Catherine Polnecq fait ressortir clairement la rapide mise en place préparatoire à la pierre noire que l’artiste pose sur le parchemin avant de passer aux crayons de pastel qui la masquent complètement », poursuit Françoise Joulie. Rare témoin d’une copie au pastel de l’un de ses propres tableaux, cette œuvre raffinée apporte de précieuses informations sur le travail de François Boucher pastelliste.
« Tableaux et dessins de la Renaissance au XXe siècle », du 25 mars au 16 mai 2025 à la galerie Alexis Bordes, 4 rue de la Paix, 75002 Paris. Tél. 01 47 70 43 30. www.alexis-bordes.com