Des fac-similés dans la grotte de Rouffignac

Évocation de réalisation de peintures rupestres dans la grotte de Rouffignac. © Éric Le Brun
Cette année, les visiteurs de la grotte de Rouffignac, en Dordogne, bénéficieront d’un bonus : la reproduction de deux panneaux d’habitude inaccessibles au grand public.
Propos recueillis par Romain Pigeaud
Un fac-similé dans une grotte réelle ! Comment est-ce possible ? On le sait, le parcours dans une grotte ornée est souvent difficile, et les œuvres fragiles. C’est pourquoi aujourd’hui il est possible de visiter des copies d’Altamira, Chauvet, Cosquer ou Lascaux. Pour les cavités originales, le cheminement est restreint et la jauge de visiteurs autorisés réduite. L’immense grotte de Rouffignac, où l’on s’introduit conduit par un petit train, comporte des réduits secrets. Son propriétaire, Frédéric Plassard, a souhaité en reproduire deux des plus célèbres : la paroi du Grand Être (une tête humaine fascinante) et le Salon rouge, avec ses mammouths gravés de 2 m de long. Pour cela, il a fait appel à Alain Dalis, auteur d’une partie des fac-similés de Chauvet et Cosquer, et sa société Arc & Os, basée à Montignac. Tous deux répondent à nos questions.
Pourquoi mettre un fac-similé à l’entrée d’une grotte ornée ? Cela ne risque-t-il pas de créer une certaine confusion ?
Frédéric Plassard : Tout dépend de la manière dont on organise la visite ! Les deux fac-similés (de 20 et 8 m2) reproduits à l’échelle 1 sont placés dans un petit espace un peu à l’écart. On les propose en fin de visite, comme compléments, après avoir vu les merveilles originales. Là nous pouvons aussi échanger avec les visiteurs et répondre à leurs questions. Cela permet aussi de diminuer le temps de présence sous le Grand Plafond (le clou de la visite) – et d’assurer ainsi une meilleure conservation de ce dernier. Par ailleurs, afin de dissiper toute confusion, les deux panneaux reproduits sont déconnectés de la paroi et « flottent » dans l’espace. Pour le Grand Être, la rambarde reproduit l’espace étroit de la galerie originelle et fait comprendre aux spectateurs qu’ils se situent « dans la roche » !
Quelles sont les principales difficultés rencontrées pour réaliser ces fac-similés ?
Alain Dalis : Si la méthode reste globalement la même (un scan 3D de la paroi est transmis à une imprimante, qui restitue les volumes à l’échelle 1, sur lesquels mon équipe et moi reproduisons les œuvres), il a fallu s’adapter au contexte. D’abord en concevant des résines spéciales qui résistent à l’humidité car l’hygrométrie dans la grotte est importante. Puis, en se mettant à la place du visiteur moderne, à peu de choses près celle de l’artiste paléolithique. Ici, nous sommes collés « au mur » et il faut en reproduire l’exacte réalité. On peut y percevoir les hésitations et les recherches des artistes de la Préhistoire. Ainsi de la paroi du Salon rouge, qui est recouverte d’une fine couche d’argile rouge, sur laquelle les Magdaléniens ont gravé, créant un effet de camée : les tracés apparaissent blancs, suivant un contraste encore aujourd’hui saisissant, plusieurs millénaires après leur réalisation. Les artistes ont aussi parfois effacé leurs traits en frottant légèrement la paroi ou ont pris des bouts d’argile pour créer un support vierge ailleurs.
Frédéric Plassard : Nous faisons ressentir aux visiteurs le travail de ces artistes plasticiens de la Préhistoire grâce aux discours de nos guides, ce qui apporte une véritable plus-value.
Pour aller plus loin
www.grottederouffignac.fr
www.hominides.com/articles/atelier-alain-dalis/