Un rarissime livre d’heures noir bientôt restauré grâce au TEFAF Museum Restoration Fund

Cercle de Willem Vrelant (actif à Bruges, Belgique, 1454-1481), Livre d'heures noir (Horae beatae marie secundum usum curie romane), vers 1458. Manuscrit enluminé sur vélin peint en noir, 15,2 x 10,7 x 2,7 cm. New York, Hispanic Society Museum & Library. Photo service de presse. © Hispanic Society Museum & Library, photo Kirk Davis Swinehart
Seuls sept livres d’heures enluminés sur vélin noir sont conservés dans le monde. L’exemplaire de l’Hispanic Society Museum & Library, à New York, est l’un d’eux. The European Fine Art Foundation (TEFAF) a annoncé qu’il bénéficierait en 2025 de son fonds de restauration pour les musées.
Accordé chaque année par la TEFAF depuis 2012, le Museum Restoration Fund est une subvention destinée à soutenir la restauration et la recherche dans les musées. Chaque foire organisée par la TEFAF donne lieu à l’annonce d’un bénéficiaire. Lors de l’édition 2025 de la TEFAF Maastricht, qui s’est tenue en mars, ce sont les Très Riches Heures du duc de Berry, chef-d’œuvre du Cabinet des livres du musée Condé actuellement au cœur d’une remarquable exposition, qui en ont bénéficié. Pour la dernière TEFAF New York, le choix s’est porté, grâce au soutien financier de Bank of America, sur la restauration d’un manuscrit rarissime : le Livre d’heures noir ou Horae beatae marie secundum usum curie romane conservé à l’Hispanic Society Museum & Library, à New York.
Le livre d’heures de Marie de Castille
Sept livres d’heures enluminés sur vélin teinté ou peint en noir, tous datant de la seconde moitié du XVe siècle, sont connus. L’exemplaire de l’Hispanic Society Museum & Library est l’un d’eux. Il se distingue par son inachèvement : seul le texte à l’encre d’or et d’argent y figure, les miniatures et bordures n’ayant jamais été réalisées. Sur le dernier folio, une note manuscrite laissée en 1656 par un ancien propriétaire de l’ouvrage indique qu’il appartenait à Marie de Castille (1401-1458), épouse d’Alphonse V d’Aragon. Les armoiries du premier folio sont en effet celles de Castille. Le livre a peut-être été offert à la reine lors du décès de son époux, en juin 1458, et laissé inachevé en raison de sa propre mort, quelques mois plus tard.

Cercle de Willem Vrelant (actif à Bruges, Belgique, 1454-1481), Livre d'heures noir (Horae beatae marie secundum usum curie romane), vers 1458. Manuscrit enluminé sur vélin peint en noir, 15,2 x 10,7 x 2,7 cm. New York, Hispanic Society Museum & Library. Photo service de presse. © Hispanic Society Museum & Library, photo Kirk Davis Swinehart
Les livres noirs, précieux et rares
Les livres noirs semblent être une spécialité flamande de la seconde moitié du XVe siècle, entre 1455 et 1480 plus précisément. La Morgan Library, à New York, en possède un, réalisé à Bruges vers 1480, que ses enluminures rendent particulièrement spectaculaire. Des analyses réalisées par la Morgan Library sur cet exemplaire et sur celui de l’Hispanic Society Museum & Library ont montré, dans les deux cas, la présence de carbone dans le noir du vélin. Cet élément, et quelques autres indices, laissent supposer qu’ils ont été exécutés dans le même atelier : celui de Willem Vrelant, enlumineur actif à Bruges de 1454 à 1481, qui travailla notamment pour le duc de Bourgogne, Philippe le Bon, et était à la tête d’un atelier florissant.

Cercle de Willem Vrelant (actif à Bruges, Belgique, 1454-1481), Livre d'heures manuscrit à l'usage de Rome (Heures de la Vierge, Office des Morts), vers 1480. Lettres argent et or sur vélin teinté de noir, 14 miniatures pleine page, 17 x 12,2 cm. New York, The Morgan Library & Museum. © Ceoil
Une restauration devenue nécessaire
Tout comme l’exemplaire de la Morgan Library, le Livre d’heures noir de l’Hispanic Society Museum & Library est en attente de sa restauration. Il a été fragilisé à la fois par le temps, par sa reliure du XIXe siècle, qui inflige au volume une pression excessive, et par de fréquentes manipulations. Acquis en 1900 par Archer Huntington, qui fonda quatre ans plus tard le musée, il en a rejoint les collections en 1933. Son intérêt historique en fait l’un des volumes les plus consultés de la collection. La restauration consistera à démonter les 149 pages avant d’en traiter les pertes, déchirures et altérations. Afin d’assurer sa préservation, les conditions de conservation et de manipulation du manuscrit seront améliorées, tandis que des photographies numériques haute définition, que les chercheurs pourront consulter sur Internet, seront réalisées.

La reliure du Livre d'heures noir de l'Hispanic Society Museum & Library a été réalisée au XIXe siècle. Photo service de presse. © Hispanic Society Museum & Library, photo Kirk Davis Swinehart





