
Après le succès l’an passé de l’exposition «Vivian Maier e(s)t son double », le musée de Pont-Aven poursuit son ouverture au médium photographique avec Willy Ronis (1910-2009). À travers 120 photographies et documents d’archives issus de la médiathèque du patrimoine et de la photographie (MPP), l’accrochage rend hommage à l’œuvre poétique de cet artiste si singulier.
L’exposition s’ouvre, dans une salle uniformément rouge, sur le célèbre cliché mettant en scène la « petite Marianne », une jeune fille coiffée d’un bonnet phrygien levant son poing en l’air lors du défilé de la victoire du Front populaire en 1936 ; l’accrochage offre ainsi dès son préambule un avant-goût de l’œuvre de ce photographe « au cœur très à gauche ». Sylvie Kervran, directrice du musée de Pont Aven, et Ronan Guinée responsable du fonds Willy Ronis à la MPP, ont conçu un parcours thématique inédit qui permet d’appréhender les différentes facettes de la photographie humaniste de Willy Ronis.

L’individu au cœur de l’objectif
Qu’elle témoigne de sa passion première – la musique –, ou qu’elle dépeigne ce que les journalistes ont coutume d’appeler des « marronniers » – en l’occurrence des scènes de fêtes foraines ou de bals –, la photographie de Ronis s’affirme avant tout à travers l’individu. « Il y a dans mes photographies un amour de la femme, un amour des enfants, de ceux qui travaillent… », déclarait-il d’ailleurs. Après avoir passé deux années éloignés les uns des autres en raison de la pandémie, l’exposition de Willy Ronis nous offre une belle opportunité de « nous retrouver », comme le propose son titre.

Un « musicien refoulé » devenu photographe reconnu
« Willy n’avait pas choisi ce métier, il était devenu photographe par devoir ». Passionné par la musique, musicien lui-même, Willy Ronis se rêvait auteur-compositeur. Lorsque son père tombe gravement malade, il est contraint d’abandonner sa vocation première pour venir l’aider dans son studio de photographie. À sa mort, il devient photoreporteur afin de subvenir aux besoins de sa famille. De sa passion pour la musique naîtront de formidables clichés présentés en nombre dans l’exposition, comme cette série de mendiants-musiciens empreinte d’une profonde mélancolie. D’« une extrême émotivité », « éternel inquiet », le photographe est également décrit comme discret, courtois et doté d’une grande sensibilité. L’ambivalence qui le caractérise se retrouve dans ses photographies marquées aussi bien par une forme tristesse à l’image de sa série des bistrots que par l’empathie comme le montre le regard bienveillant et tendre qu’il porte sur ses contemporains en particulier dans sa célèbre photographie Les amoureux de la Bastille (1957).

Simon Poirier
« Willy Ronis : se retrouver »
Jusqu’au 28 mai 2023 au musée de Pont-Aven
Place Julia, 29930 Pont-Aven
Tél. 02 98 06 14 43
www.museepontaven.fr