
Érigé entre 1806 et 1808 à la gloire de la Grande Armée victorieuse à Austerlitz, l’arc de triomphe du Carrousel renouera bientôt avec sa splendeur passée. Confronté à d’importants problèmes structurels, le chef-d’œuvre de Percier et Fontaine nécessite une intervention fondamentale, notamment financée grâce au succès en 2018 de la 9e campagne « Tous mécènes ! ». Laurence des Cars, présidente-directrice du musée du Louvre, nous présente cette restauration majeure qui vient de débuter par la dépose du quadrige couronnant le monument ; elle devrait s’achever à la veille des Jeux olympiques de 2024.
Propos recueillis par Olivier Paze-Mazzi

Quel est l’enjeu de cette restauration ?
Nous sommes très attachés à la restauration et à la préservation de nos décors intérieurs et extérieurs. Monument emblématique de Paris, et bien sûr de l’histoire du Louvre et des Tuileries, l’arc de triomphe du Carrousel est aujourd’hui dans un état très préoccupant : la pierre dont il est constitué est particulièrement corrodée et son décor sculpté, composé de reliefs, du quadrige et des huit sculptures de grognards, a beaucoup souffert. Nous sommes donc confrontés à un véritable problème, à la fois sanitaire et esthétique, qui nécessite une intervention d’envergure, qui passera par une reprise structurelle et une restauration de tous les éléments sculptés.

L’état de conservation des grognards étant préoccupant, quel sort particulier leur réservez-vous ?
Ils seront définitivement déposés, stabilisés et conservés dans notre réserve de Liévin, leur état de dégradation avancée ne permettant pas une présentation au public dans nos collections permanentes. Une exposition-dossier leur sera consacrée au Louvre-Lens, situé à proximité de notre centre de conservation. Sculptés à l’identique sous les yeux du public, de nouveaux grognards prendront place sur l’arc au début de l’année 2024.
Sur quelles bases seront-ils recréés ?
Des moulages ont heureusement été effectués, il y a pratiquement un siècle, dans les années 1930 : ils conservent le souvenir très précis d’un état bien moins dégradé. Nous disposons également de gravures. Cette opération sera par ailleurs supervisée par un comité scientifique. Il n’y aura donc pas de place pour une interprétation contemporaine.

Quels seront les prochains grands chantiers du Louvre ?
Nous allons débuter dès l’été prochain un vaste chantier de dépoussiérage et de remise en état des appartements Napoléon III, l’un des rares décors de cette époque encore intacts. Cela se fera sous la houlette de plusieurs départements du Louvre, dont celle d’Olivier Gabet, directeur du département des Objets d’art, qui pilotera cette belle aventure. Nous réfléchissons par ailleurs à la création d’une seconde grande entrée pour le Louvre par la Colonnade, un projet qui a déjà été proposé à la ministre de la Culture et au président de la République. Comme vous le savez, nous souffrons de saturation, ce qui rend parfois l’accueil des visiteurs difficile : nous avons frôlé les 8 millions de visiteurs en 2022, malgré une limite fixée à 30 000 les jours de grande fréquentation. Il s’agit du double de ce que la pyramide était supposée pouvoir absorber : en 1989, lors de son inauguration, on envisageait une fréquentation annuelle de 4 millions de visiteurs ! Je crois que le dogme de l’entrée unique est désormais dépassé ; un rééquilibrage est indispensable afin d’offrir un meilleur confort d’accueil et de visite. Notre public doit pouvoir accéder plus rapidement aux départements de son choix : actuellement, si vous souhaitez par exemple découvrir la peinture française, le chemin depuis la pyramide se révèle particulièrement long. Le Grand Louvre s’était en effet focalisé sur la cour Napoléon, sans vraiment se préoccuper de la cour Carrée et de l’esplanade.
Vous avez annoncé il y a peu la restauration de La Liberté guidant le peuple. Quel en est le calendrier ?
La restauration débutera à la rentrée et devrait se terminer en 2024. Le public international qui affluera pour les Jeux olympiques pourra donc admirer le chef-d’œuvre de Delacroix dans toute sa splendeur retrouvée.