Musée de l’Image d’Épinal : et la mode créa ses lectrices

Attribué à Léonce Schérer (dessinateur), Jules Verronais, La Crinolomanie, Metz, 1857. Lithographie coloriée au pochoir. Épinal, collection musée de l’Image. Photo service de presse. © Musée de l’Image / cliché E. Erfani
Le musée de l’Image se penche sur plus d’un siècle et demi d’illustrations de mode féminine, du règne de Louis XVI jusqu’à l’aube de la Seconde Guerre mondiale.
Lancée en 1778, la Galerie des modes et costumes français dessinés d’après nature est un cahier périodique de six estampes en noir et blanc ou coloriées, publié par les éditeurs parisiens Jacques Esnauts (ou Esnault) et Michel Rapilly. Mais c’est en 1785 que paraît, sur le modèle anglais, le premier hebdomadaire français de mode, Le Cabinet des modes ou les Modes nouvelles, rebaptisé en 1786 Le Magasin des Modes nouvelles françaises et anglaises. Après la tourmente révolutionnaire, le genre renaît dès le Directoire. En effet, en 1797, le libraire Jean-Baptiste Sellèque crée le Journal des Dames et des Modes. Pris en main par Pierre de La Mésangère, il s’imposera comme le premier grand titre de la presse féminine et ne disparaîtra qu’en 1839.

Watteau de Lille (dessinateur), Jacques-Philippe Le Bas (graveur), « Jolie Femme courant au rendez-vous de l’Amour », avant 1783. Gravure à l’eau-forte et au burin, 28 x 19,4 cm (planche). Galerie des modes et costumes français dessinés d’après nature, planche 386. Éditeurs Esnauts et Rapilly, Paris. Dijon, Bibliothèque municipale. Photo service de presse. © Bibliothèque municipale de Dijon
Plus de cent revues
Le Consulat et l’Empire font de Paris la capitale de la mode. La Restauration et surtout le règne de Louis-Philippe la voient se répandre dans la bourgeoisie. Plus de cent revues la commentent. Le Bon Ton, qui paraît tous les cinq jours, publie une estampe en couleurs dans chaque numéro et les couturiers en vue fournissent des patrons publiés dans la revue. Quant aux toutes jeunes femmes, elles ont également leurs médias. Les deux filles du peintre Alexandre Colin, Héloïse Leloir et Anaïs Toudouze, fournissent des aquarelles pour Le Magasin des Demoiselles.
Les sœurs Colin
Sous le Second Empire, quatre-vingts revues environ s’adressent aux lectrices. En 1860, l’éditeur Firmin-Didot en lance une de grand format, La Mode illustrée. L’objet de la publication, dirigée jusqu’en 1902 par Emmeline Raymond, est d’« apprendre au moyen de gravures et de descriptions d’une rigoureuse exactitude à toutes les mères de famille et aux jeunes personnes à faire par elles-mêmes tous les objets utiles à leur entretien ». Les sœurs Colin y participent et leurs aquarelles sont reproduites, selon l’abonnement souscrit, en noir et blanc ou en couleurs. On peut y admirer des crinolines de grandes couturières comme des tenues élégantes mais plus aisées à porter dont les patrons sont publiés. Quant aux robes extravagantes des femmes de la haute société, elles font la joie des caricaturistes qui transforment les crinolines en cages pour les oies ou en montgolfières.
Patrons et estampes en supplément
Publiée jusqu’en 1937, La Mode illustrée accompagne l’apparition des tournures et poufs destinés à mettre en valeur une taille affinée par le corset. Puis la tournure disparaît mais la taille de guêpe reste longtemps de mise. Alors que Le Petit Écho de la Mode poursuit depuis 1880 une formule populaire avec patrons et estampes en supplément, Lucien Vogel, qui considère la couture comme un art, lance en 1912 La Gazette du Bon Ton illustrée des lithographies de Georges Lepape, Paul Iribe ou Raoul Dufy. Ces derniers mettent en valeur les lignes nouvelles de Paquin, Lanvin, Doucet, Worth et Poiret. Dix ans plus tard, Vogel crée, avec Le Jardin des Modes, une formule moins élitiste mais dotée d’une maquette remarquable et dont la couverture s’orne d’une photographie. Modes et Travaux, créé en 1919, conservera longtemps la gravure d’illustration quand Marie-Claire, lancé en 1937, misera d’emblée sur la photographie.

Simone A. Puget (dessinatrice), « Le Lys rouge. Robe du soir de Paul Poiret », avril 1914. 19 x 24,5 cm (feuille). La Gazette du Bon Ton n° 4, planche 38. Éditeur Lucien Vogel. Collection privée. Photo service de presse. © DR
« Suivez-moi jeune homme. Images de mode et presse féminine (1778-1939) », jusqu’au 18 mai 2025 au musée de l’Image Ville d’Épinal, 42 quai de Dogneville, 88000 Épinal. Tél. 03 29 81 48 30. www.museedelimage.fr
Album de l’exposition, musée de l’Image, 48 p., 12,50 €.





