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La Villa du Temps retrouvé se réinvente à Cabourg

Louis-Alexandre Dubourg (1821-1891), La Jetée de Honfleur, 1888. Huile sur toile, 35,5 x 60,5 cm. Le Havre, musée d’Art moderne André Malraux.

Louis-Alexandre Dubourg (1821-1891), La Jetée de Honfleur, 1888. Huile sur toile, 35,5 x 60,5 cm. Le Havre, musée d’Art moderne André Malraux. © MuMa Le Havre / David Fogel

Attirant chaque année près de 40 000 visiteurs depuis son ouverture en 2021, le musée de la Belle Époque et de l’œuvre de Marcel Proust a vu son parcours immersif presque entièrement renouvelé, tandis que des prêts d’œuvres du musée des Beaux-Arts de Caen, de l’Institut Pasteur et du musée intercommunal d’Étampes enrichissent l’exposition temporaire consacrée à Louis Pasteur.

Paradis perdu

Pour Jérôme Clément, président d’honneur des Amis de la Villa, « nous avons tous besoin de rêver à un passé qui n’est plus, le paradis perdu de notre enfance et, mieux encore, celui de nos parents, cherchant dans un passé embelli une réponse aux problèmes d’aujourd’hui ». Il y a certainement de cela, dans le plaisir de déambuler dans ce lieu dédié à la mémoire d’un passé fantasmé, fleurant bon l’innocence et un certain art de vivre ; d’y retrouver le temps des Eiffel, Méliès, Rodin et Debussy, magistralement restitué par un subtil dialogue entre œuvres, mobilier et dispositifs multimédias. Photographies anciennes, dessins de Proust, manuscrits… : on peut y approcher de près chaque tableau, chaque objet, grâce à la muséographie intimiste de cette « maison habitée d’œuvres », dont le parcours Belle Époque est agrémenté de modules sonores et de médiation numérique, qui participent à la reconstitution de l’atmosphère de la période, dans le cadre charmant d’une demeure privée.

D’hier et aujourd’hui

Mais la Villa n’est pas seulement pensée comme un temple de la nostalgie, d’un temps révolu, mais au contraire comme un lieu où passé et présent se rencontrent : ici, les œuvres d’artistes célèbres accueillis en résidence, à l’instar de David Hockney (2021) alors en villégiature à quelques kilomètres du musée, Adel ­Abdessemed (2022) ou encore Anh Duong (2024), montrent toute l’actualité, la modernité et la pertinence des thèmes littéraires de Proust, qui continuent d’alimenter une créativité artistique résolument contemporaine. Mais le propos demeure toujours ancré dans cette région si chère au cœur de l’auteur de La Recherche. « La Normandie constitue pour Proust le site par excellence des souvenirs, et le lieu fondamental de l’écriture », rappelle Jérôme Neutres, commissaire général et président du comité scientifique et culturel de la Villa. C’est pourquoi le regard tendre de l’écrivain sur la Côte Fleurie croise bien sûr celui d’artistes de la Belle Époque, comme Louis-Alexandre Dubourg, qui a peint La Jetée de Honfleur (1888) dont l’atmosphère visuelle fait parfaitement écho à certains passages d’À l’ombre des jeunes filles en fleurs, ou Édouard Vuillard qui a représenté, dans son projet préparatoire À la Divette, au bord de la rivière (1913), un jardin qui n’est pas sans rappeler Du côté de chez Swann. Les photographies d’un tout jeune Proust en uniforme militaire, ses pages raturées, les eaux-fortes, aquarelles et archives forment avec les œuvres un formidable continuum, où les créations récentes de l’ancien pensionnaire de la Villa Médicis Yan Pei-Ming et de l’artiste numérique Quayola illustrent à leur manière la pérennité du romancier et de son génie littéraire. Enfin, le visiteur peut approfondir sa découverte de la Belle Époque grâce aux expositions temporaires consacrées à Louis Pasteur et aux petits métiers immortalisés par Eugène Atget.

Le salon de réception de la Villa du Temps retrouvé à Cabourg.

Le salon de réception de la Villa du Temps retrouvé à Cabourg. © Ville de Cabourg

La Villa du Temps retrouvé, 15 avenue du président Raymond Poincaré, 14390 Cabourg. Tél. 02 31 47 44 44. www.villadutempsretrouve.com

Catalogue, éditions Faton, 176 p., 29 €. À commander sur www.faton.fr