
Jusqu’au printemps prochain, le Metropolitan Museum of Art propose une vaste exposition réunissant des dizaines d’œuvres exceptionnelles, témoignant du raffinement esthétique et de la complexité spirituelle des Mayas au cours du Ier millénaire de notre ère.
Avec l’Égypte pharaonique, l’empire khmer et Carthage, la civilisation maya représente l’une des cultures anciennes les plus fantasmées au monde. Abreuvé de documentaires en tous genres, voire de superproductions hollywoodiennes (Apocalypto de Mel Gibson, 2012 de Roland Emmerich) mêlant sans distinction faits scientifiques et extravagances scénaristiques, le grand public s’est constitué un album d’images « romantiques » où des sacrifices humains sanglants côtoient des cités abandonnées du Yucatán, des prophéties cataclysmiques, des codex remplis de mystérieux glyphes et des crânes de cristal. La magnifique exposition organisée par le Met – en collaboration avec le Kimbell Art Museum – contribue à rationaliser les approches et à mettre un peu d’ordre dans la confusion des idées.
Vies de dieux
Que nous disent aujourd’hui les sources historiques et les vestiges archéologiques sur les récits cosmogoniques et le panthéon mythologique de ces « Grecs du Nouveau Monde » ? Répartis entre le Mexique, le Bélize et le Guatemala au sein de diverses cités-États concurrentes et jamais unifiées, les Mayas développèrent à la période dite Classique (250-900) un art religieux d’une puissante beauté, racontant par l’iconographie l’origine des astres et des dynasties royales, la vie des déesses et des dieux, ainsi que les luttes héroïques menées aux temps primordiaux. Céramiques peintes polychromes, pendentifs en jade, stèles sculptées monumentales, conques gravées et colorées à l’hématite, panneaux en sapotillier (un bois exotique) : tous les supports ont été utilisés, toutes les techniques employées par ces artistes à la virtuosité époustouflante – dont certains signaient même leurs œuvres !

L’apothéose du silex
C’est également entre le VIIe et le VIIIe siècle que fut porté à son apogée, en Mésoamérique, l’art de la taille du silex. Les eccentric flints, comme les appellent les spécialistes, sont de prodigieuses sculptures, d’une finesse d’exécution inégalée. L’un de ces superbes objets, aménagé dans du silex noir, met en scène le jeune dieu du Maïs, embarqué sur un canoë en route vers sa renaissance triomphale. Au fil des vitrines, l’on se captive pour les différents épisodes des sagas mythiques. Ici, un vase décoré montre le dieu à oreilles de jaguar présidant l’assemblée des divinités. Là, un bas-relief antérieur à la période Classique relate le Commencement de Tout : le combat du dieu Soleil avec un oiseau monstrueux qui s’oppose à l’aube, sous l’œil pantois d’un crocodile dont la queue se transforme en arbre luxuriant. En bref, une exposition incontournable pour tous les passionnés d’archéologie précolombienne.
Jules Masson Mourey
« Lives of the Gods. Divinity in Maya Art »
Jusqu’au 2 avril 2023 au Metropolitan Museum of Art
1000 Fifth Avenue, New York, NY 10028
Tél. +1 212 535 7710
www.metmuseum.org