Pour la première fois, la méthode de datation par l’uranium-thorium est employée sur le continent africain pour dater la calcite recouvrant des peintures dans le massif de Lovo, en République démocratique du Congo. Cela constitue un grand bond en avant pour la recherche sur l’art rupestre africain.
À l’ouest de la République démocratique du Congo, le massif de Lovo concentre la majeure partie (117) des 160 sites d’art rupestre identifiés dans la province du Kongo Central, selon l’inventaire pratiqué par Geoffroy Heimlich. Connues depuis le XVIe siècle, ces peintures et gravures réparties sur un espace de 430 km2 font l’objet d’une étude moderne et soutenue depuis 2016. Les motifs représentés sont des formes animales (lézard, antilope, canidé, oryctérope…), humaines (des chasseurs) ou géométriques rouges (motifs circulaires, scalariformes et empreintes de doigts). Or, ces derniers font l’objet de toutes les attentions, car leur lien avec les autres motifs est peu clair et il est envisagé qu’ils soient plus anciens. D’autant qu’ils se retrouvent également en Zambie, au Malawi, au Mozambique ainsi qu’en Angola et dans la province congolaise du Katanga. Il pourrait s’agir de traces laissées par une population de chasseurs-cueilleurs, les Twa, ancêtres probables des pygmées, présents dans la région avant les migrations des agro-pasteurs bantous.
Nouvelles méthodes et nouveaux résultats
Jusqu’à présent, les datations étaient plutôt relatives : on examinait les superpositions des tracés, pour repérer ceux réalisés en premier, et on établissait des classifications stylistiques. Les chercheurs ont alors souhaité dater les dépôts carbonatés recouvrant les parois décorées, ce qui est possible grâce à la méthode de l’uranium-thorium. C’est la première fois que celle-ci est employée sur le continent africain. Dans certains cas, il a été possible de coupler les analyses avec une autre méthode : celle du radiocarbone, toujours grâce à la présence de formations carbonatées. Il s’agit d’un cas assez rare où les deux méthodes peuvent s’appliquer simultanément et donc se contrôler mutuellement. Les résultats obtenus, homogènes et cohérents dans l’ensemble, suggèrent que les peintures rouges géométriques ont été réalisées entre les XVIe et XVIIIe siècles. Il n’a malheureusement été possible d’obtenir qu’une seule date au carbone 14 fiable sur la couche recouvrant les peintures, fournissant ainsi une date minimale d’environ 1629 ans de notre ère. Mais les recherches continuent !
Jacques Daniel
Retrouvez le point de vue du spécialiste Geoffroy Heimlich dans :
Archéologia n° 616 (janvier 2023)
La cuisine gauloise à la lumière de l’archéologie
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