Un diagnostic réalisé par l’Inrap au château de Cons-la-Grandville, en Meurthe-et-Moselle, a révélé de façon inattendue, dans le cimetière paroissial attenant, la tombe d’un capitaine de la Garde impériale de Napoléon Ier dont l’identité a été retrouvée et le destin romanesque retracé.
Âgé de 89 ans, il portait sur le torse, sous sa main gauche, une médaille militaire de Sainte-Hélène en bronze à laquelle étaient attachés des fragments de ruban et une épingle. Celle-ci avait été décernée en 1857 par Napoléon III, selon les dernières volontés de Napoléon Ier, aux vétérans ou « compagnons de gloire » qui avaient servi durant les guerres révolutionnaires et napoléoniennes. Considérée comme la première « médaille commémorative » française, elle fut remise à près de 405 000 soldats vétérans ayant servi sur terre et sur mer la République ou l’Empire entre les années 1792 et 1815.
Jean-Jacques Zentz : une carrière au service de l’Empereur
Les recherches dans les archives locales et militaires ont permis d’identifier le vieillard récompensé : Jean-Jacques Zentz (1787-1876), né dans une famille de boulangers aubergistes à Coblence (Koblenz) en Rhénanie, devenu français en 1797, lors de la création du département de Rhin-et-Moselle. Le jeune homme de 19 ans, instruit, grand et bien bâti est engagé comme élève officier (vélite) d’un régiment de grenadiers de la Garde, dont il gravira les échelons jusqu’à devenir capitaine. Dès 1806, il participe à la campagne de Prusse et de Pologne, première d’une longue série qui lui fera traverser durant dix ans toute l’Europe, de l’Espagne à la Russie, où il combat notamment à la bataille de Krasnoï pour protéger la retraite de la Grande Armée. Licencié fin 1815 après Waterloo, il vit de son traitement en demi-solde jusque vers 1831 où il devient percepteur et notable local. Marié à une jeune femme aisée de Cons-la-Grandville, il s’y installe et a huit enfants, dont un fils qui embrassera aussi une carrière militaire. Son squelette fait apparaître de probables stigmates de ses combats, tel un coup violent reçu sur le crâne, infligé par un objet tranchant, un sabre probablement. Son bassin incliné, ses vertèbres déformées évoquent les conséquences d’une grave blessure au bas-ventre survenue en 1814, signalée dans ses états de service. Le soldat qui reçut des mains de Napoléon Ier la croix de la Légion d’honneur repartit à la guerre lors des Cent-Jours. Cette décoration n’a pas été retrouvée dans sa tombe, car certainement léguée à ses héritiers.
Éléonore Fournié