La grotte de Blombos en Afrique du Sud est célèbre pour ses tracés gravés et dessinés, premiers témoignages d’une expression graphique d’Homo sapiens entre – 100 000 et – 70 000 ans. Une nouvelle synthèse propose une théorie originale concernant la socialisation du corps humain à la Préhistoire.
Quel site curieux ! Alors que les premiers Homo sapiens sont connus en Afrique du Nord à Jebel Irhoud (Maroc, – 300 000 ans), c’est à l’autre bout du continent que se sont accumulées, à partir de 100 000 ans, plusieurs innovations culturelles (gravures abstraites, dessins au crayon d’ocre, objets de parure) témoignant de la création de systèmes symboliques complexes.
Un complexité croissante
Entre 100 000 et 77 000 ans, les habitants de la grotte de Blombos ramassent quelques coquillages, naturellement perforés. Autour de – 73 000 ans, ils visitent des estuaires et ne prélèvent qu’une seule espèce, des Nassarius kraussianus, que les artisans trouent, chauffent pour en modifier la couleur ou couvrent d’ocre. À la fin de cette période, vers – 70 000 ans, ils ajoutent à ces perles un autre coquillage, de plus grande taille, appartenant à l’espèce Tritia ovulata. Cette complexité croissante est-elle allée de pair avec une sophistication progressive de la société, qui exigeait de nouvelles possibilités pour se distinguer les uns des autres ? C’est l’hypothèse de l’équipe qui vient de publier cette recherche.
Vers la « culturalisation » du corps humain
En extrapolant à partir d’une synthèse des données archéologiques sur l’évolution des méthodes pour transformer l’apparence du corps, comme l’utilisation d’ocre dès 300 000 ans en Afrique et en Europe, et l’évolution des parures en Afrique et en Eurasie, ils proposent un scénario en dix étapes pour la « culturalisation » du corps humain. Cette approche inédite devrait motiver de futures recherches sur la manière et les raisons qui ont poussé les sociétés à changer leur apparence au fil du temps.
Jacques Daniel
Dossier à retrouver en intégralité dans :
Archéologia n° 629 (mars 2024)
Pour une archéologie de la forêt
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