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L’archéologie de la peste et des épidémies

Évocation d’une scène d’enterrement de malades de la peste au VIe siècle dans le sud de la Gaule. © Éric Le Brun
Évocation d’une scène d’enterrement de malades de la peste au VIe siècle dans le sud de la Gaule. © Éric Le Brun

La récente crise sanitaire mondiale a ravivé les souvenirs de grandes épidémies historiques – qui ont marqué l’histoire de l’Antiquité romaine comme celle de notre monde médiéval et moderne. Si de nombreux témoignages littéraires en décrivent les ravages, comment l’archéologie permet-elle de caractériser ou d’identifier précisément la peste en des siècles où son bacille, découvert en 1894 seulement, était ignoré par les contemporains ? Grâce à de récentes et décisives études, ce jalon essentiel du passage de l’Antiquité tardive au Moyen Âge, qu’a été la terrible peste justinienne, bénéficie d’un éclairage nouveau, tandis que l’archéologie continue d’apporter son lot de révélations. En exclusivité, Archéologia vous présente quelques-uns des extraordinaires apports de l’archéologie de la peste !

Au sommaire de ce dossier :

Épidémies, climat et crises sociales dans l’Empire romain

La période romaine a été le théâtre d’une série extraordinaire d’épidémies mortelles. Au milieu des années 160, sous le règne des empereurs Marc Aurèle et Lucius Verus, une pandémie se déclenche. Appelée « peste antonine », elle n’en est pourtant pas une, comme celle qui eut lieu au IIIe siècle, dite de « Cyprien », avant que véritablement ne se déclare la peste dite de Justinien. Comment se manifestèrent ces trois maladies ? Quelles furent leurs conséquences et quelle fut la part des facteurs climatiques et environnementaux dans leur développement ?

Portrait de l’empereur Justinien Ier. Mosaïque byzantine du VIe siècle. Ravenne, basilique de San Vitale. © Pictures from History / Bridgeman Images
Portrait de l’empereur Justinien Ier. Mosaïque byzantine du VIe siècle. Ravenne, basilique de San Vitale. © Pictures from History / Bridgeman Images

La pandémie de Justinien signe-t-elle la fin du monde antique ?

Des trois pandémies de l’Empire romain, la « peste de Justinien » fut la plus grave : plus de deux siècles d’épidémies récurrentes axées sur la Méditerranée. Il y a 50 ans déjà, Jacques Le Goff et Jean-Noël Biraben avaient esquissé ce que les textes permettaient d’entrevoir : une contagion débarquant dans une Gaule mérovingienne où l’on écrivait toujours sur du papyrus égyptien, savourait le vin de Gaza, assaisonnait ses repas d’épices et sertissait ses bijoux de grenats, importés d’Asie du Sud. Qu’en est-il aujourd’hui du défi formulé par leurs grandes questions sur les conséquences spirituelles, démographiques et géopolitiques de la peste justinienne ?

Illustration 3D du bacille de Yersinia pestis. © PRB ARTS
Illustration 3D du bacille de Yersinia pestis. © PRB ARTS

Rats des villes, rats des routes et poissons plats

Les épizooties, épidémies qui affectent les espèces sauvages et d’élevage, sont nombreuses. Certaines sont susceptibles de devenir des zoonoses, c’est‐à‐dire de se propager à l’homme. Si aujourd’hui la pandémie de la Covid‐19 en constitue une illustration flagrante, des zoonoses anciennes sont documentées par l’archéologie. Les restes osseux des rongeurs et les exosquelettes de certains ectoparasites sont, à cet égard, riches d’enseignements.

Quand l’archéologie funéraire entre en scène

En France, le très grand nombre de fouilles préventives permet aujourd’hui d’analyser un élément décisif de la connaissance des pandémies et de la peste : l’archéologie funéraire qui révèle les comportements humains face au fléau et aux inhumations hors-normes qu’il provoque.

Sépulture dite « atypique » du VIIIe siècle découverte à Montévrain, « 22 Arpents », en Seine‐et‐Marne. © Laure Pecqueur, Inrap
Sépulture dite « atypique » du VIIIe siècle découverte à Montévrain, « 22 Arpents », en Seine‐et‐Marne. © Laure Pecqueur, Inrap

Étude de cas : les tombes « anormales » du VIe siècle à Lunel‐Viel

Dans la plaine littorale de la cité antique de Nîmes, dans l’Hérault, la petite agglomération de Lunel‐Viel se constitue dans la seconde moitié du Ier siècle de notre ère. Au Ve siècle, les bâtiments du Haut‐Empire sont abandonnés et récupérés pour la construction d’un quartier voisin. Or, au début des années 1990, huit corps ont été mis au jour dans une tranchée de démolition. Si la singularité de cet ensemble renvoie à une circonstance accidentelle et exceptionnelle, l’étude des restes osseux a permis de comprendre la raison de rejet.

D’une peste à l’autre : l’épidémie de 1720-1722 à Marseille

Beaucoup mieux connu que la peste justinienne, l’épisode épidémique qui touche Marseille au début du XVIIIe siècle a très fortement marqué les contemporains et les mémoires. Plusieurs fouilles ont permis de mieux comprendre la gestion de cette traumatisante mort de masse et de mieux identifier ces victimes comme la virulence du virus.

Les auteurs de ce dossier sont Isabelle Catteddu, Valérie Delattre, Philippe Charlier, Stéphane Frère, Kyle Harper, Mike McCormick, Claude Raynaud, Solenn Troadec et Stéfan Tzortzis

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