Le 15 décembre prochain seront inaugurés les premiers tronçons du « Train Maya ». Les voies dessineront à terme une boucle de 1554 kilomètres autour de la péninsule du Yucatán, dans le sud-est du pays. Un archéologue mexicain et ses soutiens dénoncent les nombreuses destructions du patrimoine maya occasionnées par des travaux titanesques. Enquête sur un projet qui déraille.
Le « Train Maya », dont la construction a débuté en décembre 2018, est le projet phare du mandat du président de la République mexicaine Andrés Manuel López Obrador (AMLO). « Un projet générateur de bien-être et d’aménagement territorial qui vise à interconnecter la région du sud-est, protéger l’environnement, impulser la culture et relancer l’économie », souligne le gouvernement. Les pressions ont été fortes pour pouvoir inaugurer ce 15 décembre les quatre premières sections reliant Palenque (Chiapas) à Cancún, soit 861 kilomètres. Dès l’annonce de ce projet présidentiel, les autorités ont écarté d’un revers de main les premières voix s’inquiétant d’une sauvegarde insuffisante d’un patrimoine qui ne manquerait pas d’émerger au cours des travaux. Ceux-ci ont pourtant débuté tambour battant, avant même la livraison d’études d’impact environnemental, et sans véritable consultation des populations mayas concernées. AMLO a rejeté les critiques des « pseudo-environnementalistes » et promis que « pas un arbre » ne serait coupé. Si un important plan de reforestation a été annoncé sur 50 000 hectares, l’institution en charge du projet (Fonatur) a dû admettre en début d’année que près de 3,5 millions d’arbres avaient déjà été abattus ou déplacés, dont les deux tiers entre Cancún et Tulum. Ce même tronçon a vu se multiplier des défis techniques pour éviter l’effondrement d’un sol karstique sous lequel se trouvent nombre de grottes et de rivières souterraines.
Un projet de « sécurité nationale »
Ce « Train Maya » coûtera un minimum de 25 milliards d’euros et connectera cinq États du sud-est mexicain (Chiapas, Tabasco, Campeche, Yucatán et Quintana Roo). Il transportera touristes et habitants le jour, marchandises la nuit. La boucle comptera 16 stations principales et de nombreux petits arrêts. En plus de relier des villes comme Campeche, Mérida, Cancún et Chetumal, ce train passera par les plus célèbres sites archéologiques mayas : Palenque, Chichén Itzá, Tulum et Calakmul. Encore à l’écart des grands flux touristiques, cette dernière fut une des plus puissantes cités de la période classique maya (environ 200 à 850 de notre ère), avec sa grande rivale Tikal située au nord du Guatemala voisin. Si de sublimes sites archéologiques mayas seront plus facilement accessibles, le développement de l’urbanisation et du tourisme de masse est à craindre à l’orée de la deuxième plus vaste forêt tropicale du continent américain.
Gaëtan Mortier
Article à retrouver en intégralité dans :
Archéologia n° 626 (décembre 2023)
Splendeur des collections antiques du Louvre
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