
En septembre 1940, la découverte de la grotte de Lascaux à Montignac, en Dordogne, résonne comme un coup de tonnerre dans la communauté des préhistoriens français et étrangers. Savants, amateurs et curieux se pressent sur le domaine de la comtesse Emmanuel de la Rochefoucauld pour y découvrir un bestiaire peint constitué de plus de 600 chevaux, cerfs, aurochs, bouquetins et bisons. Maurice Thaon fut le premier à en faire de remarquables relevés couleurs.
Fin septembre 1940, après avoir averti le ministre de l’Instruction publique de la découverte de cette « curiosité archéologique », le préfet de Dordogne charge Maurice Thaon, « disciple de l’abbé Breuil », de prendre toutes les mesures de conservation nécessaires jusqu’au classement de la grotte. Ce jeune parisien de 32 ans se trouve alors à Montignac, après sa démobilisation. Féru de grottes ornées, il est reconnu par l’éminent préhistorien comme bon dessinateur.
Relever pour sauver, conserver et diffuser
Pendant un an, aidé de Pierre Gaisseau, un jeune homme réfugié à Montignac, Thaon dessine, dans des conditions très difficiles (son entraînement d’alpiniste l’aide grandement), un premier jeu des figures de Lascaux. À la suite du classement de la grotte au titre des Monuments historiques en décembre 1940, Thaon sollicite l’aide de la direction générale des Beaux-Arts pour se procurer du matériel. Il reçoit, à la fin de l’année 1940, la somme provisionnelle de 5 000 francs. Achevés en octobre 1941, ses relevés sont examinés par le préhistorien Jean Buyssonie, puis par Raymond Lantier, directeur du musée des Antiquités nationales (MAN), et par Raymond Vaufrey, professeur à l’Institut de Paléontologie. Tous en soulignent la qualité. Lors de la séance du comité consultatif d’architecture du 18 mai 1942, il est alors décidé, d’une part d’acheter à Thaon ses trente-et-un relevés pour 50 000 francs et, d’autre part, de les conserver au nouvel Office de documentation des Monuments historiques (ODMH), étant entendu que le MAN pourrait les exposer. Les relevés sont enregistrés par l’ODMH sous les numéros 17287 à 17317 et, dès fin 1945 ou début 1946, ils rejoignent le MAN où ils sont conservés jusqu’à aujourd’hui. Pour autant, les travaux de Thaon à Lascaux ne s’arrêtent pas là. En avril 1942, il demande à participer aux campagnes de fouilles de la grotte avec l’abbé Buyssonie et Saint-Just Péquart, pour compléter les relevés et pour photographier peintures et gravures. En raison du contexte contemporain, seule la couverture photographique est réalisée.
Camille Duclert
Conservatrice du patrimoine
Médiathèque du patrimoine et de la photographie
Corinne Jouys Barbelin
Conservatrice en chef du patrimoine
Responsable du service des Ressources documentaires
Musée d’Archéologie nationale – Domaine national de Saint-Germain-en-Laye

À retrouver en intégralité dans :
Archéologia n° 622 (juillet-août 2023)
Délos, le miracle grec, 150 ans de fouilles
81 p., 11 €.
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