
Après « Bric-à-Brac pour les Dieux » ? à Lons-le-Saunier en 2017 et « Des offrandes pour les Dieux ? » à Metz en 2019, la nouvelle exposition du musée Vivant Denon continue d’explorer les révolutions de l’âge du Bronze.
En effet, au cours de cette longue période (2300-800 avant notre ère), les Européens découvrent et apprennent peu à peu à maîtriser cet alliage du cuivre et de l’étain pour la réalisation des objets utilitaires, des armes ou des parures. Le bronze modifie leur quotidien : résistant, il remplace les outils en pierre et, malléable, offre une multitude de nouvelles formes. Si de très nombreuses découvertes ont été faites au sein des habitats et des nécropoles, d’autres, plus insolites et propres à cette période, ont eu lieu dans les cours d’eau. Ainsi les fouilles subaquatiques menées dans le lit de la Saône, du Rhin, de la Seine, de la Loire, dans les lacs alpins ou les marais ont révélé un nombre incroyable d’objets qui nous dévoilent le fonctionnement de ces sociétés qui devenaient de plus en plus hiérarchisées et de leurs énigmatiques dépôts bronziers.
Une exceptionnelle tasse en or
Cette tasse a été découverte vers 1880 en lisière de la forêt de Paimpont, au bord de la rivière Aff. Acquise par le musée d’Archéologie nationale en 1972, elle est composée d’un bol fabriqué d’une seule pièce. Une anse à deux anneaux a été ajoutée par rivetage. Une frise ciselée autour du col est composée de douze oiseaux stylisés à très long bec, une ligne de ponctuations ornant leurs têtes à la manière d’une crête et une autre reliant l’oeil de chacun au dos du précédent. La panse est recouverte de motifs solaires. Souvent associés dans les cultures de l’âge du Bronze final, l’oiseau, la barque et le soleil sont fréquemment représentés sur les récipients à boisson. Découverts généralement en contexte funéraire ou de dépôt, ces objets évoquent un usage de libations rituelles.

notre ère ? Saint-Germain-en-Laye, musée d’Archéologie nationale – Domaine de Saint-Germain-en-Laye. © MAN, Valorie Gô
Un « dépôt de prestige »
Découvert au début des année 1980, ce « dépôt de prestige » est composé de trois ensembles de parures de tailles différentes pouvant correspondre à trois âges différents de la vie d’une femme. Les objets étaient répartis en plusieurs lots juxtaposés au sein d’une même fosse : les parures étaient déposées dans un chaudron, les jambières étaient emboîtées à proximité, les anneaux et des pendeloques disparates dans une urne en céramique. Ces bijoux soulignent le genre et le rang dans la société de ce riche personnage ; les vaisselles utilisées lors de cérémonies symboliseraient son statut religieux. La plupart des pièces sont de facture « régionale », mais le chaudron provient peut-être d’une importation de la grande plaine hongroise ou de la vallée de la Tisza, témoignant ainsi de relations commerciales à longue distance.

Une concentration d’épées
Les épées de type Tachlovice soulignent les échanges à l’échelle européenne, notamment vers l’Europe centrale, qui se tissent à l’âge du Bronze. Toutes possèdent une garde à ailerons, un pommeau très arqué et une poignée qui allie métal et garnitures décoratives organiques (en os ou en corne). Ce spécimen s’est diffusé selon une diagonale allant de l’axe Saône-Rhône jusqu’aux côtes sud-ouest de la mer Baltique, la Saône constituant alors l’une des plus importantes aires de concentration d’épées à poignée métallique à la fin de l’âge du Bronze.

Une seconde épée, de type Saint-Nazaire, provient de son côté des gués de Tournus et de Jean-de-Saône qui ont fourni des épées remarquables par leur qualité et leur rareté. La localisation de tous ces objets reste cependant incertaine, car ces dragages anciens n’étaient pas placés sous la surveillance d’archéologues.

Éléonore Fournié
Portfolio à découvrir en intégralité dans Archéologia n° 611, juillet-août 2022.
« Des épées pour la Saône ? Les dépôts de l’âge du Bronze en milieu humide »
Jusqu’au 8 janvier 2023 au musée Vivant Denon
Place de l’Hôtel de Ville, 71100 Chalon-sur-Saône
Tél. 03 85 94 74 41
www.museedenon.com
Catalogue, éditions Musée Vivant Denon, Ville de Châlon-sur-Saône, 132 p., 30 €.