Si l’Antiquité romaine évoque infailliblement la spectaculaire civilisation de l’Empire, il existe pourtant une autre Rome, sans laquelle les splendeurs des siècles suivants n’auraient jamais existé : celle de l’époque républicaine. Ce monde souvent idéalisé dispose pourtant d’un riche patrimoine archéologique. L’exposition des musées du Capitole restitue ce pan d’histoire de la Ville éternelle, du début du Ve au milieu du Ier siècle avant notre ère.
La topographie et l’architecture de la ville antique, l’essence et les transformations de la société romaine pendant les cinq siècles de la République sont retracées par une approche captivante et innovante. Peu connues pour la plupart, les pièces exposées racontent la vie d’anonymes et illustrent la maxime de Flaubert que cite Claudio Parisi Presicce, commissaire de l’événement avec Isabella Damiani : « Ce ne sont pas les perles qui font le collier, mais le fil ». Le seul personnage célèbre que l’on y croisera en effet est Cicéron, affirmant : « La res publica est la chose du peuple, et le peuple n’est pas une quelconque association d’hommes, mais une union fondée sur des intérêts et des droits communs ». Provenant de fouilles menées dans les années qui ont suivi l’annexion de Rome au Royaume d’Italie (1870) ou lors de la réorganisation de la ville dans les années 1920 et 1930, « ces pièces ont été fort peu étudiées, observe Parisi Presicce. Elles n’ont jamais été montrées au public et étaient entreposées dans d’innombrables caisses qui ont longtemps erré dans la ville à la recherche d’un emplacement avant de rejoindre le musée de la Civilisation romaine pour y être analysées et exploitées ». Isabella Damiani ajoute que si tant d’œuvres – 1 800 – sont dévoilées aujourd’hui, c’est « pour donner une idée de la richesse de ces découvertes ». Ainsi pourra-t-on admirer la maîtrise des toutes premières mosaïques, noires et blanches, en damier ou en losange, caractéristiques de la domus romaine.
Image inédite de Rome
Curateur des eaux sous Nerva, Frontin note dans son De aquaeductu urbis Romae que « 441 ans après la fondation de la Ville, les Romains se contentaient encore de l’eau du Tibre, des sources et des puits. » Puis, remplacés par les aqueducs, ces derniers furent condamnés et remplis de matériaux, devenant souvent de véritables dépôts votifs. Le plus important, découvert à la fin du XIXe siècle sur l’Esquilin, était dédié à Minerva Medica : il contenait des centaines d’ex-votos en terre cuite, généralement des parties du corps pour lesquelles une guérison était demandée. L’explosion de couleurs rouges, vertes et bleues suggère aussi une image inédite de la décoration des sanctuaires publics, comme dans le temple de Jupiter Optimus Maximus sur le Capitole (inauguré en 509 avant notre ère) et dans les quatre temples du Largo Argentina, édifiés entre la seconde moitié du IVe siècle et la première moitié du Ier siècle avant notre ère. L’exposition retrace également l’évolution de l’artisanat. À partir du IIIe siècle avant notre ère, se développe une production de masse, standardisée, qui répond aux exigences du marché. Nombreux sont les objets ou symboles, par exemple les portraits en cire des ancêtres, grâce auxquels certaines catégories sociales souhaitaient afficher leur statut, atteint par les fonctions électives et le cursus honorum, « institutions » nées à l’époque républicaine et qui feront la grandeur de la Rome impériale.
Daniela Fuganti, traduction Carole Cavallera
« La Roma della Repubblica. Il racconto dell’archeologia »
Jusqu’au 24 septembre 2023 aux musei Capitolini
Palazzo Caffarelli, Piazza del Campidoglio 1, 00186 Rome
www.museicapitolini.org