Demeurée dans le secret d’un appartement parisien depuis près de quatre-vingt-dix ans, une exquise commode royale, apparue sur le marché à la faveur d’un inventaire, devrait cet automne enflammer les enchères. Munie de son certificat d’exportation, elle pourrait quitter le territoire français.
Avis aux amateurs éclairés et aux châteaux-musées : l’ultime commode identifiée pour une chambre du roi Louis XV sera proposée à la vente le 25 novembre prochain chez Saint-Germain-en-Laye Enchères. Livrée le 4 août 1738 par Antoine-Robert Gaudreaus (vers 1682-1746, reçu maître en 1708), ébéniste de la Couronne de 1726 à 1746, pour la chambre du roi au château de la Muette, pavillon de chasse jouxtant le bois de Boulogne offert par le Régent à son royal protégé. Il ne s’agit cependant pas d’une création de l’ébéniste : afin de répondre à cette commande passée dans le cadre de l’aménagement d’un appartement pour le monarque au premier étage du château, ce dernier fait appel à Charles Cressent (1685-1768, reçu maître en 1708), fournisseur favori du Régent et de nombreux princes français et étrangers. Emblématique du style « à palmes et fleurs » développé par l’ébéniste, cette commode à la marqueterie de satiné géométrique arbore un riche décor végétal de bronze doré.
De la Muette aux parfums Forvil
Localisée à la Muette jusqu’en 1775, la commode gagne ensuite les collections des comtes de Gramont jusqu’en 1934, date à laquelle elle est vendue à la galerie Charpentier par l’étude Ader. Elle y retient l’attention de Léo Finck, propriétaire des parfums Forvil, dans la descendance duquel elle se trouve actuellement.
Les commodes du « Bien-Aimé »
On connaît plusieurs de ces commodes qui un jour veillèrent sur les nuits du « Bien-Aimé », toutes livrées entre 1738 et 1744 et désormais conservées au sein de prestigieuses institutions. À tout seigneur, tout honneur, citons d’abord la célèbre commode de Gaudreaus pour la chambre du roi à Versailles (1739), exceptionnellement prêtée à l’institution par la Wallace Collection en 2022 à l’occasion de l’exposition consacrée aux passions du monarque ; le château a acquis en 2013 celle livrée par l’ébéniste pour la chambre du roi à Choisy (1744) ; mentionnons encore la commode livrée par Joubert à Fontainebleau, retournée à la « maison des siècles » en 2020.
Un commode bientôt exilée ?
Estimé entre 500 000 et 700 000 €, ce meuble insigne s’est vu accorder le 29 septembre dernier son certificat d’exportation par le ministère de la Culture, ouvrant la porte à sa sortie du territoire. Un recours gracieux a été déposé par Julien Lacaze, président de l’association Sites & Monuments, le 13 novembre dernier.
Olivier Paze-Mazzi
Vente Saint-Germain-en-Laye, SGL Enchères
Le 25 novembre 2023 à 14h30.
www.sgl-encheres.com
À lire :
Charles Cressent
360 p., 79 €.
À commander sur : www.faton-beaux-livres.com
À lire :
Antoine Robert Gaudreaus
Ébéniste de Louis XV
512 p., 55 €.
À commander sur : www.faton-beaux-livres.com