Un poignant Saint Sébastien de Louis Finson offert au musée des Beaux-Arts de Marseille

Louis Finson (vers 1575-1617), Saint Sébastien (détail), 1612. Huile sur toile, 147,5 x 114,5 cm. Marseille, musée des Beaux-Arts. Photo service de presse. © Ville de Marseille
Le musée des Beaux-Arts de Marseille vient de recevoir un don exceptionnel : un tableau de Louis Finson représentant saint Sébastien. Proche de Caravage, ce peintre ayant travaillé à Naples et à Marseille est déjà présent dans les collections de la cité phocéenne mais demeure rare dans les musées français.
Passé en vente le 18 juin dernier chez Ader, le Saint Sébastien de Louis Finson (vers 1575-1617), adjugé 416 000 euros (frais inclus), a non seulement largement dépassé son estimation, mais aussi établi un record pour l’artiste. L’œuvre a ensuite été acquise par la Fondation JG, abritée par la Sauvegarde de l’Art Français, qui souhaitait en faire don au musée des Beaux-Arts de Marseille, ville où le peintre a séjourné entre 1613 et 1614.
« Aloysius Finsonius Belga Brugensis »
Ainsi Louis Finson a-t-il signé le Saint Sébastien, rappelant son origine flamande et nommant la ville où il est né, vers 1575 : Bruges. Après s’y être formé, le peintre choisit de partir pour Naples, où l’on trouve sa trace en 1605. Lorsque Caravage y parvint, fuyant Rome, ils se lièrent d’amitié et travaillèrent dans le même atelier. Finson adopta rapidement le style pictural de son ami et réalisa plusieurs copies de ses œuvres, destinées à la vente – le Flamand était en effet marchand autant que peintre. En 1613, il quitta Naples pour Marseille, travaillant également à Aix-en-Provence et Arles, puis séjourna à Toulouse et à Paris avant de gagner Amsterdam, où il mourut en 1617. Il fut l’un des premiers flamands à diffuser le clair-obscur et le réalisme caravagesques en Europe.

Louis Finson (vers 1575-1617), Saint Sébastien, 1612. Huile sur toile, 147,5 x 114,5 cm. Marseille, musée des Beaux-Arts. Photo service de presse. © Ville de Marseille
Un Saint Sébastien napolitain
L’œuvre qui vient d’être offerte à Marseille fait probablement partie des toiles que Finson emporta lorsqu’il quitta Naples en 1613. Elle est réapparue en 1994, date à laquelle elle fut vendue par un collectionneur marseillais. Plusieurs versions non signées sont connues, dont l’une est conservée à la primatiale Saint-Jean, à Lyon. Finson choisit ici un saint souvent représenté à l’époque, conformément aux préconisations du concile de Trente, mais exécuté d’une manière particulièrement expressive, montrant sa parfaite assimilation du caravagisme.
« […] son visage est renversé en arrière dans une extase baroque, suivant le goût de l’artiste pour des images fortes, déconcertantes, riches en émotion et en mouvement. Ses tableaux témoignent d’une connaissance profonde du style du Caravage napolitain, comme le montre notre toile, qui développe un clair-obscur fortement contrasté, à reflets de bronze pour la peau de sa figure, un certain expressionnisme outrancier et un goût pour des images spectaculaires destinées à frapper le spectateur. »
Éric Turquin, cabinet Turquin
Finson dans les collections marseillaises
Le musée des Beaux-Arts de Marseille conserve plusieurs autres œuvres de l’artiste : son Autoportrait (1613), Samson et Dalila (1613-1616) et une copie d’après Caravage, La Madeleine en extase (1612), toile elle aussi réalisée à Naples et emportée à Marseille. Le Saint Sébastien a été présenté au public du 3 au 5 octobre et va maintenant être restauré. Il retrouvera les cimaises du musée des Beaux-Arts à l’automne 2026.

Le Saint Sébastien de Louis Finson est exposé jusqu'au 5 octobre entre son Autoportrait (à droite) et Samson et Dalila (à gauche). Photo service de presse. © Ville de Marseille
Judith et Holopherne : Finson ou Caravage ?
Le nom de l’artiste s’était déjà retrouvé dans la lumière il y a de cela quelques années. En 2014, une toile représentant Judith et Holopherne avait été retrouvée dans un grenier, près de Toulouse. Présumée être de Caravage, l’œuvre avait divisé les spécialistes du peintre, certains y voyant la main de Louis Finson. À l’occasion de sa vente en juin 2019, L’Objet d’Art avait réalisé un dossier complet, donnant la parole à de nombreux experts.





