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Le calendrier des Très Riches Heures du duc de Berry décrypté mois par mois. Juin : « La fenaison »

Les frères de Limbourg, vers 1411-1416, et Barthélemy d’Eyck, vers 1446, Très Riches Heures du duc de Berry, ms. 65, folio 6 v°, le mois de juin, « La fenaison » (détail). Chantilly, bibliothèque du musée Condé. 21 x 29 cm.

Les frères de Limbourg, vers 1411-1416, et Barthélemy d’Eyck, vers 1446, Très Riches Heures du duc de Berry, ms. 65, folio 6 v°, le mois de juin, « La fenaison » (détail). Chantilly, bibliothèque du musée Condé. 21 x 29 cm. © GrandPalaisRmn (Domaine de Chantilly)/Michel Urtado

Réalisées au XVe siècle, les Très Riches Heures du duc de Berry sont sans doute le manuscrit le plus célèbre au monde. Enluminées par les frères de Limbourg, éminents artistes attachés à la cour de Bourgogne puis de Berry, qui ont révolutionné l’histoire de l’art, elles se composent de 121 miniatures qui captivent par leurs représentations de châteaux historiques, de scènes princières et des travaux des champs rythmés par les saisons. À l’occasion de la restauration de ce chef-d’œuvre, montré seulement deux fois au public depuis la fin du XIXe siècle, il est possible d’admirer les 12 folios du calendrier dérelié jusqu’au 5 octobre dans la salle du Jeu de Paume du château de Chantilly. Nous vous proposons aujourd’hui de plonger au cœur du folio 6 v°, « La fenaison », illustrant le mois de juin.

On change de perspective sur le palais de la Cité. Les peintres l’ont représenté du côté d’une prairie située en bordure de Seine, le long du bras d’eau qui séparait alors l’île de la Cité de l’ancienne île aux Juifs.

Vue sur le palais

La scène est dépeinte depuis l’emplacement de l’hôtel de Nesle, résidence parisienne du duc de Berry, que fréquentaient les Limbourg. Le palais est pour sa part figuré avec une grande minutie. On y admire les jardins du roi cachés à l’abri des remparts, avec leurs pergolas. Des invités, arrivés en barque, gravissent l’escalier couvert menant au palais. S’agit-il des invités du mariage de Marie de Berry et de Jean de Bourbon ? Sont-ils ajoutés par Barthélemy d’Eyck à une architecture peinte par les frères de Limbourg ?

Les frères de Limbourg, vers 1411-1416, et Barthélemy d’Eyck, vers 1446, Très Riches Heures du duc de Berry, ms. 65, folio 6 v°, le mois de juin, « La fenaison » (détail). Chantilly, bibliothèque du musée Condé. 21 x 29 cm.

Les frères de Limbourg, vers 1411-1416, et Barthélemy d’Eyck, vers 1446, Très Riches Heures du duc de Berry, ms. 65, folio 6 v°, le mois de juin, « La fenaison » (détail). Chantilly, bibliothèque du musée Condé. 21 x 29 cm. © GrandPalaisRmn (Domaine de Chantilly)/Michel Urtado

Un panorama architectural fidèle

Le panorama architectural est d’une grande fidélité. On reconnaît la Salle sur l’eau construite sous le règne de saint Louis, scandée au nord comme au sud par sept contreforts, les trois tours Bonbec, d’Argent et de César, puis la tour de l’Horloge plus tardive. Derrière la galerie Saint-Louis se détachent les deux pignons de la Grande Salle construite sous Philippe le Bel, et au-delà le Logis du Roi, la tour Montgomery. La Sainte-Chapelle avec sa rosace d’origine domine la scène et rappelle que Jean de Berry en fit ériger deux, à Bourges et à Riom, sur son modèle.

Les frères de Limbourg, vers 1411-1416, et Barthélemy d’Eyck, vers 1446, Très Riches Heures du duc de Berry, ms. 65, folio 6 v°, le mois de juin, « La fenaison » (détail). Chantilly, bibliothèque du musée Condé. 21 x 29 cm.

Les frères de Limbourg, vers 1411-1416, et Barthélemy d’Eyck, vers 1446, Très Riches Heures du duc de Berry, ms. 65, folio 6 v°, le mois de juin, « La fenaison » (détail). Chantilly, bibliothèque du musée Condé. 21 x 29 cm. © GrandPalaisRmn (Domaine de Chantilly)/Michel Urtado

Rateau, faux, chapeau

Dans la prairie, deux paysannes rassemblent le foin à l’aide d’une fourche et d’un râteau. Comme pris dans une danse cadencée, trois hommes fauchent l’herbe. Ils travaillent en chemise, jambes et pieds nus, la tête protégée du soleil par un chapeau de paille ou de tissu. Dans la partie du champ déjà fauchée, plus claire, les meulons de foin bien alignés et la rangée de saules vont diminuant pour donner de la profondeur à l’image. La scène du premier plan est due à Barthélemy d’Eyck, qui termina la miniature laissée inachevée par les frères de Limbourg. On reconnaît son style au teint pâle et à la pupille haute des jeunes femmes, au reflet de la barque sur l’eau ou bien encore à l’ombre de la robe sur la jambe de la paysanne au râteau.

Les frères de Limbourg, vers 1411-1416, et Barthélemy d’Eyck, vers 1446, Très Riches Heures du duc de Berry, ms. 65, folio 6 v°, le mois de juin, « La fenaison ». Chantilly, bibliothèque du musée Condé. 21 x 29 cm.

Les frères de Limbourg, vers 1411-1416, et Barthélemy d’Eyck, vers 1446, Très Riches Heures du duc de Berry, ms. 65, folio 6 v°, le mois de juin, « La fenaison ». Chantilly, bibliothèque du musée Condé. 21 x 29 cm. © GrandPalaisRmn (Domaine de Chantilly)/Michel Urtado

« Les Très Riches Heures du duc de Berry » jusqu’au 5 octobre 2025 au Château de Chantilly, Salle du Jeu de Paume, 60500 Chantilly. Tél. : 03 44 27 31 80. chateaudechantilly.fr

Art de l’enluminure n° 93, Éditions Faton, 16 €.