
Dans une exposition qui fait pendant à celle du musée Condé, le musée de l’Armée s’appuie sur ses riches collections et des prêts rares pour retracer les temps forts de la période des guerres de Religion, un demi-siècle qui a profondément divisé et meurtri le royaume de France.
L’exposition met en scène les durs conflits qui ont divisé le royaume entre la mort accidentelle d’Henri II, en 1559, et l’assassinat en 1610 d’Henri IV, souverain pacificateur qui, douze ans après avoir promulgué l’édit de Nantes (1598), meurt victime, comme son prédécesseur, d’un régicide. Cette « part sombre » de la Renaissance, qui en quarante ans voit se succéder huit guerres, naît d’une situation inédite où se superposent de vives querelles religieuses, des troubles civils et une profonde remise en cause du pouvoir royal : à partir du massacre de Wassy le 1er mars 1562, affrontements, répressions, scandales et massacres bouleversent l’équilibre du pays.

Une période aux multiples enjeux
Les différentes parties en présence, la Ligue des catholiques menée par les Guise, le clan protestant conduit par les Condé, le parti des Montmorency, se sont incarnés dans des personnages demeurés fameux, à l’image de Gaspard de Coligny ou du cardinal Charles de Lorraine (dont on découvrira à l’exposition le grand portrait par Greco, en provenance du Kunsthaus de Zurich) : on comprend mieux à travers eux comment les rivalités aristocratiques et politiques se mêlent aux conflits religieux. Ces grandes figures jalonnent un parcours en dix riches sections mêlant peintures, objets d’art, pièces d’équipement guerrier, gravures, ouvrages et documents insignes, retraçant par le menu toute la chronologie des événements. Parmi eux, le document de l’édit de Nantes prêté par les Archives nationales, des armures prestigieuses, comme celle du connétable Anne de Montmorency, mais aussi un tableau anonyme figurant l’abjuration d’Henri IV le 25 juillet 1593 en la basilique Saint-Denis, spectaculaire conversion au catholicisme visant à rallier les Ligueurs. L’un des grands mérites de l’exposition est de replacer les guerres de Religion dans le contexte plus large d’un royaume affaibli non seulement par la banqueroute de l’État, le retour des épidémies et la méfiance croissante à l’égard de l’Église romaine et du clergé, mais aussi par le recul de la France sur l’échiquier diplomatique avec le traité du Cateau-Cambrésis (3 avril 1559), qui bénéficie largement à l’Espagne.

Armelle Fayol

À retrouver dans :
Dossiers de l’Art n° 306
Antoine Caron au musée national de la Renaissance – château d’Écouen
82 p., 11 €.
À commander sur : www.dossiers-art.com
« La Haine des clans. Guerres de Religion, 1559-1610 »
Jusqu’au 30 juillet 2023 au musée de l’Armée
Hôtel national des Invalides
129 rue de Grenelle, 75007 Paris
Tél. 01 44 42 38 77
www.musee-armee.fr
Catalogue, In Fine éditions d’art, 360 p., 39 €.